LBC-FT : Le Cameroun, le Sénégal, le Burkina, la RDC le Nigeria et le Mali sur liste grise du GAFI


Par Dr ZOGO |


Par une sortie datant du 23 février 2024, ces pays sont considérés par la Groupe d’Action Financière comme des juridictions à haut risque qui présentent d'importantes lacunes stratégiques dans leurs régimes de lutte contre le blanchiment de capitaux, le financement du terrorisme et le financement de la prolifération.

 Comme on le sait, le Groupe d'action financière (GAFI) est l'organisme mondial de surveillance du blanchiment de capitaux et du financement du terrorisme, publie deux déclarations à la fin de chaque réunion plénière, en février, juin et octobre.

Ces déclarations fournissent un bref résumé des actions récentes entreprises conformément au plan d'action de chaque juridiction, ainsi qu'une liste des déficiences stratégiques restant à traiter. Les deux déclarations reflètent les différents niveaux de risque posés à tout moment par les déficiences dans les juridictions examinées.

QUELQUES PAYS SOUMIS A UNE SURVEILLANCE RENFORCEE (27 OCTOBRE 2023 – 24 FEVRIER 2024)

Le Cameroun : En juin 2023, le Cameroun a pris l'engagement politique de haut niveau de travailler avec le GAFI et le GABAC pour renforcer l'efficacité de son régime de LBC/FT. Depuis octobre 2021, le Cameroun a progressé sur certaines des actions recommandées en renforçant la capacité des autorités d'enquête et des organes judiciaires à mener efficacement les affaires de blanchiment de capitaux et de financement du terrorisme. Le pays doit tout de même s'efforcer de mettre en œuvre son plan d'action du GAFI par les moyens suivants (1) en alignant les stratégies et politiques nationales de LBC/FT sur les conclusions faites contre lui et en assurant le suivi de leur mise en œuvre, et en démontrant la coopération et la coordination en matière de LBC/FT entre les autorités compétentes ; (2) en assurant une hiérarchisation des demandes de coopération internationale en fonction des risques et en y répondant de manière efficace ; (3) en renforçant la surveillance des banques fondée sur les risques et en mettant en œuvre une surveillance efficace fondée sur les risques pour les IF non bancaires et les Entreprises et Professions Non Financières Désignées, et en menant une action de sensibilisation appropriée auprès des IF et des OBNL présentant un risque élevé ; (4) en maintenant et garantissant l'accès en temps utile des autorités compétentes à des informations adéquates et actualisées sur la propriété effective des personnes morales, et établir un régime de sanctions pour les violations des obligations de transparence applicables aux personnes morales ; (5) en renforçant l'échange sécurisé d'informations les entités déclarantes et les autorités compétentes, et accroître la diffusion des rapports de renseignement pour répondre aux besoins opérationnels des autorités compétentes.

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RDC : Depuis octobre 2022, date à laquelle la RDC s'est engagée à travailler avec le GAFI et le GABAC afin de renforcer l'efficacité de son régime de LBC/FT, le pays a pris des mesures visant à améliorer son régime de LBC/FT, notamment en finalisant l'évaluation nationale des risques (ENR), en désignant une autorité de surveillance pour toutes les OBNL et en fournissant davantage de ressources à la CRF. La RDC devrait continuer à travailler à la mise en œuvre de son plan d'action du GAFI afin de remédier à ses défaillances stratégiques, notamment en : (1) en diffusant l'ARN sur le blanchiment de capitaux et le financement du terrorisme et en adoptant une stratégie nationale de LBC/FT ; (2) en élaborant et en mettant en œuvre un plan de surveillance fondé sur les risques ; (3) en renforçant la capacité de la CRF à mener des analyses opérationnelles et stratégiques ; (4) en renforçant les capacités des autorités impliquées dans les enquêtes et les poursuites en matière de blanchiment de capitaux et de financement du terrorisme ; et (5) en démontrant une mise en œuvre efficace des SFT liées au financement du terrorisme et au financement du secteur privé.

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Le Burkina Faso :  Depuis février 2021, date à laquelle le Burkina Faso s'est engagé à un haut niveau politique à travailler avec le GAFI afin de renforcer l'efficacité de son régime de LBC/FT, il a pris des mesures visant à améliorer son régime de LBC/FT, notamment en réalisant des évaluations thématiques des risques pour les secteurs à haut risque et en renforçant ses mécanismes de tenue des statistiques relatives à la coopération internationale et aux enquêtes et poursuites en matière de blanchiment de capitaux et de financement du terrorisme.

Cependant, le pays reste interpellé à continuer à travailler à la mise en œuvre de son plan d'action pour remédier à ses insuffisances stratégiques, notamment en renforçant les capacités de toutes les autorités de contrôle en matière de LBC/FT et en mettant en œuvre une supervision basée sur le risque des IF et des EPNFD ; en tenant à jour des informations complètes sur les personnes morales et leurs bénéficiaires effectifs, et en renforçant le système de sanctions en cas de violation des obligations de transparence ; en augmentant la diversité des déclarations d'opérations suspectes ; établir des procédures pour la mise en œuvre effective de la déclaration de transport transfrontalier de devises et d'instruments négociables au porteur ; mener des enquêtes et des poursuites en matière de financement du terrorisme en fonction de son profil de risque ; et (6) mettre en œuvre un régime efficace en matière de financement du terrorisme et de financement du secteur privé, ainsi qu'un suivi et une supervision des OBNL fondés sur les risques.

Mali : Depuis octobre 2021, date à laquelle le Mali s'est engagé à haut niveau à travailler avec le GAFI afin de renforcer l'efficacité de son régime de LBC/FT, le pays a pris des mesures visant à améliorer son régime de LBC/FT, notamment en développant une méthodologie d'évaluation des risques pour les inspections des Entreprises et Professions Non Financières Désignées à haut risque, en démontrant l'application de sanctions en cas de non-conformité aux règles de LBC/FT, et en renforçant la capacité des autorités chargées de l'application de la loi à mener des enquêtes et des poursuites en matière de blanchiment d'argent et de financement du terrorisme. Le Mali devrait continuer à travailler à la mise en œuvre de son plan d'action pour remédier à ses insuffisances stratégiques, notamment en (1) en diffusant son évaluation des risques de BC/FT associés à tous les types de personnes morales et en démontrant un accès opportun à des informations précises sur les bénéficiaires effectifs ; (2) en identifiant et en enquêtant sur les activités de financement du terrorisme conformément au profil de risque du pays, y compris en menant des enquêtes financières parallèles et en recourant à d'autres mesures de justice pénale lorsqu'une condamnation pour financement du terrorisme n'est pas possible ; (3) en renforçant et en mettant en œuvre le cadre juridique et les procédures de TSF relatives au financement du terrorisme et à la PF ; et (4) en mettant en œuvre une approche fondée sur les risques pour la supervision du secteur des OBNL afin de prévenir les abus à des fins de financement du terrorisme.

Le GAFI note les progrès continus réalisés par le Mali dans le cadre de son plan d'action, cependant toutes les échéances ont désormais expiré et il reste du travail à accomplir. Le GAFI encourage le Mali à poursuivre la mise en œuvre de son plan d'action afin de remédier aux défaillances stratégiques mentionnées ci-dessus dès que possible.

Le Nigéria : Depuis février 2023, date à laquelle il s'est engagé à haut niveau à travailler avec le GAFI afin de renforcer l'efficacité de son régime de LBC/FT, le Nigéria a pris des mesures visant à améliorer son régime de LBC/FT, notamment en achevant son évaluation des risques résiduels de blanchiment de capitaux et de financement du terrorisme. Le pays devrait continuer à travailler à la mise en œuvre de son plan d'action pour remédier à ses défaillances stratégiques, notamment en (1) en diffusant son évaluation du risque résiduel de blanchiment de capitaux et de financement du terrorisme et en mettant à jour sa stratégie nationale de lutte contre le blanchiment de capitaux et le financement du terrorisme afin de l'aligner sur les autres stratégies nationales relatives aux infractions principales à haut risque ; (2) en renforçant la coopération internationale formelle et informelle en fonction des risques de blanchiment de capitaux et de financement du terrorisme ; (3) en améliorant la surveillance des IF et des PSNFD fondée sur les risques de blanchiment de capitaux et de financement du terrorisme et en renforçant la mise en œuvre des mesures préventives pour les secteurs à haut risque ; (4) en veillant à ce que les autorités compétentes aient accès en temps utile à des informations exactes et actualisées sur la propriété effective des personnes morales et en appliquant des sanctions en cas de manquement aux obligations en matière de propriété effective ; (5) démontrer une augmentation de la diffusion des renseignements financiers par la CRF et leur utilisation par les autorités chargées de la lutte contre le blanchiment d'argent ; (6) démontrer une augmentation soutenue des enquêtes et des poursuites en matière de blanchiment d'argent en fonction des risques de blanchiment d'argent ; (7) détecter de manière proactive les violations des obligations de déclaration des devises et appliquer les sanctions appropriées et maintenir des données complètes sur les actifs gelés, saisis, confisqués et cédés ; (8) démontrer une augmentation soutenue des enquêtes et des poursuites pour différents types de blanchiment d'argent ; (9) démontrer une augmentation soutenue des enquêtes et des poursuites en matière de blanchiment d'argent.

Sénégal : Depuis février 2021, date à laquelle il s'est engagé à un haut niveau politique à travailler avec le GAFI afin de renforcer l'efficacité de son régime de LBC/FT, le Sénégal a mené une analyse afin de comprendre le risque d'abus des OBNL à des fins de financement du terrorisme et a mené des actions de sensibilisation basées sur le risque auprès des OBNL.

Cependant, le Sénégal devrait continuer à travailler sur la mise en œuvre de son plan d'action pour remédier à ses défaillances stratégiques, y compris en : (1) améliorant la conformité en détectant les infractions à la LBC/FT et en imposant des sanctions efficaces, proportionnées et dissuasives à l'encontre des EPNFD contrevenantes ; (2) mettant à jour et en conservant des informations complètes sur les bénéficiaires effectifs des personnes morales et des constructions juridiques ; (3) identifiant et en enquêtant sur les activités de FT conformément au profil de risque du pays ; et (4) mettant en œuvre un régime efficace de TSF relatif au FT et au PF, ainsi qu'un suivi et une supervision des OBNL fondés sur les risques.

Le GAFI note les progrès continus réalisés par le Sénégal dans le cadre de son plan d'action, mais toutes les échéances ont expiré et il reste du travail à accomplir. Le GAFI appelle le Sénégal à mettre en œuvre rapidement son plan d'action afin de remédier aux défaillances stratégiques susmentionnées dès que possible, étant donné que toutes les échéances ont expiré en septembre 2022.

En rappel, selon le GAFI, pour tous les pays identifiés comme présentant un risque élevé, un appel est lancé à tous les membres et toutes les juridictions à appliquer des diligences renforcées. Dans les cas les plus graves, les pays sont invités à appliquer des contre-mesures pour protéger le système financier international contre les risques de blanchiment de capitaux, de financement du terrorisme et de financement de la prolifération (ML/TF/PF) émanant des ces pays mis à l’index par une liste souvent appelée "liste noire".

Depuis février 2020, à la lumière de la pandémie de COVID-19, le GAFI a suspendu le processus d'examen pour l'Iran et la Corée du Nord, étant donné qu'ils sont déjà soumis à l'appel du GAFI pour des contre-mesures. L'Iran a présenté son rapport en janvier 2024 sans aucun changement important dans l'état de son plan d'action. Compte tenu des risques accrus de financement de la prolifération, le GAFI réitère son appel à appliquer des contre-mesures à ces juridictions à haut risque.