CAMEROUN : Enfin un cadre réglementaire clair pour les comptes bancaires inactifs


Par WZ |


Le décret n° 2023/08500 du 1er décembre 2023 fixant les modalités de transfert des fonds et valeurs à la Caisse de dépôts et Consignations fait prendre jour à un angle mort juridique : le compte bancaire inactif y trouve un régime juridique clair et prévisible. Comprendre !

Pour les praticiens du marché bancaire, comme Dr Brice Carlin SINDJUI SIANI, avant la décision politique de mettre effectivement en œuvre la Caisse de Dépôts et Consignations l’année dernière, « l'on ne pouvait pas clairement dire ce qu'on entend par compte bancaire inactif en droit positif camerounais, la raison étant liée au fait qu'aucun règlement CEMAC, aucun texte national ne définissait la notion contrairement au législateur UMOA qui prévoit un régime clair en la matière. »

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Pour trouver une solution à cette situation de vide réglementaire, la pratique a alors consacré la voie contractuelle en prévoyant des réponses dans les termes de la convention établie entre les usagers et l’établissement bancaire et de microfinance, à tout le moins.

 

LES DISPOSITIONS DU DECRET DE 2023


Les dispositions de l'article 3 du décret n° 2023/08500 du 1er décembre 2023 fixant les modalités de transfert des fonds et valeurs à la Caisse de dépôts et Consignations apportent une définition claire de la notion de compte bancaire inactif. Tout d’abord, le compte courant inactif est compris comme un compte bancaire individuel créditeur qui n’a enregistré aucune opération autre que celles initiées par la banque (perception de frais et commissions, versement d’intérêts) pendant plus de douze (12) mois. La période d’observation des comptes courants par un établissement bancaire ou de crédit est de cinq (05) ans à partir de la constatation de l’inactivité avant sa transmission à la CDEC.

Par la suite, il est précisé que le compte d'épargne inactif quant à lui est tout compte bancaire créditeur qui n’a enregistré aucune opération autre que celles initiées par la banque (perception de frais et commissions, versement d’intérêts) pendant une période de trente-six (36) mois. La période d'observation des comptes d’épargne inactifs est de cinq (05) ans à partir de la constatation de l’inactivité avant sa transmission à la CDEC.

Dans manière globale et par assimilation au compte courant, le compte inactif s’entend dans ce décret comme tout compte sur lequel aucun mouvement n'a été constaté pendant plus de douze (12) mois a l'initiative du titulaire, de son représentant légal ou de la personne habilitée par lui.

ANALYSE

D’emblée, il faut indiquer que cette définition de la notion et de la procédure de traitement des comptes inactifs est purement nationale et donc un règlement de la Commission bancaire ou de l’UMAC pourrait remettre en cause ces acquis.

Dans un autre sens, pour Dr SIANI, il est clair que la période à prendre en compte pour identifier un compte bancaire inactif varie suivant la nature du compte en question loin de la durée de 12 mois automatisée par la pratique dans le passé. De plus, il ressort à dire d’expert que « lorsque le législateur évoque les opérations sur le compte, il s'agit des opérations initiées par le titulaire du compte, son représentant ou une personne habilitée par lui et donc, par conséquent, le prélèvement des frais et commissions, le versement des intérêts effectués par la banque ne sont pas pris en compte pour justifier de l'activité du compte. »



Il ressort donc que, le législateur ajoute un délai d'observation de 05 ans pour permettre au banquier de mener les diligences afin de retrouver le titulaire du compte, le mandataire et ses ayants droit le cas échéant. C’est seulement au bout de ce délai d'observation que les établissements bancaires assujettis sont obligés de transférer le solde créditeur de ces comptes à la Caisse des Dépôts et Consignations du Cameroun (CDEC).

A cet effet, l'article 5 alinéa 4 de la loi n° 2008/003 du 14 avril 2008 régissant les dépôts et consignations considère les fonds issus des comptes inactifs des établissements bancaires comme des sommes qui doivent faire l’objet de dépôts et consignations à la CDEC. De manière pratique, la clôture unilatérale desdits comptes est un passage obligé avant le transfert des fonds et valeurs à la CDEC sous peine des sanctions dévolues à la CDEC qui dispose du privilège du trésor. L’article 7 (4) du Décret précité indique d’ailleurs que « Tout transfert de fonds et/ou valeurs dévolus à la CDEC, qui intervient au-delà du délai prévu, donne droit au paiement à la CDEC d’un intérêt de retard calculé au Taux de la Facilité de Prêt Marginal (TPFM) de la Banque des Etats de l’Afrique Centrale majoré de deux points. »

 



En dernière analyse, les bénéficiaires ou ayants droit de ces comptes inactifs disposent de la possibilité d’une action en restitution contre la CDEC dans le délai trentenaire. C’est passé ce délai de 30 ans qu’en vertu de l'article 6 alinéa 2 du décret n° 2023/08500 du 1er décembre 2023 que la CDEC sera tenue de reverser définitivement ces fonds dans le compte unique du Trésor de l'Etat du Cameroun.