D’entrée de jeu, la CITAC a établi que l’aviation Commerciale en Afrique présente un potentiel énorme mais sous-exploité. La contribution de l’aviation commerciale au PIB Afrique est ainsi de 63 milliards USD. Dans le même temps, l’état des lieux est peu reluisant. La rencontre des experts au CITAC est sans ambages,
« Les compagnies aériennes d’Afrique Centrale sont sujettes à des difficultés, restructurations, redressements, arrêts d’activités, essentiellement dû aux faiblesses structurelles suivantes :
- Sous-capitalisation au regard du caractère fortement capitalistique de l’industrie du transport aérien ; Faiblesse de l’offre de financements bancaires adaptée aux besoins ;
- Politiques d’acquisition des aéronefs inadéquates et inefficientes au regard des enjeux, des risques, et de leur coût important ;
- Problèmes de gouvernance et absence de vision stratégique, qui entraînent des prises de décisions aléatoires et extrêmement risquées ;
- Charges d’exploitation généralement élevées et non-maitrisées qui ne permettent pas de générer des profits ;
- Faiblesse des systèmes de contrôle interne et de Reporting financiers, sources de risques et de fraudes ;
- Systèmes d’information insuffisamment développés et performants ;
- Utilisation insuffisante et limitée des expertises régionales disponibles.
- L’activité de fret aérien n’est pas suffisamment prise en compte par les compagnies aériennes et les aéroports de l’Afrique Centrale dans leurs stratégies de développement, en lien avec les besoins et les opportunités existantes dans la sous-région Afrique Centrale. »
Entre les pays sans aucune compagnie aérienne ( Tchad ou RCA) et ceux avec des compagnies malades, la CEMAC aérienne ne paye pas de mille.
LE FINANCEMENT DE L’AERIEN EN ZONE CEMAC
Les experts se sont penchés sur le financement, notamment en ressortant quatre méthodes populaires d’utilisation ou d’acquisition d’aéronefs. Il s’est agi de l’affrètement ; la copropriété ; la location et l’achat d’avions. Un point d’honneur a été mis sur la location (operating lease) qui pour un avion dédié, comporte deux options: « wet lease » et « dry lease ».
Le Wet lease s’entend du moment où le propriétaire de l’aéronef (le bailleur) fournit l’aéronef, l’équipage, la maintenance et l’assurance (ACMI) au locataire, qui ne paie que pour les heures effectuées. Le locataire paie le carburant, les redevances aéroportuaires, ainsi que d’autres droits, taxes, etc. La durée du Wet lease est souvent de 1 à 24 mois.
A lire également : DROIT DE LA CONSOMMATION | TECH | CAMEROUN : L'Agence de Régulation des Télécommunication épingle MTN, ORANGE, VIETTEL et CAMTEL
Le Dry lease (location à sec) oblige le bailleur à ne fournir que l’aéronef, tandis que le locataire assume les frais d’assurance, d’équipage, de personnel au sol, d’équipement de support, de maintenance et autres. Un Dry lease typique dure deux ans ou plus. La compagnie aérienne retourne l’avion au bailleur à la fin du bail. Les coûts des contrats de location-exploitation sont classés en trois grandes catégories : Le loyer Généralement de l’ordre de 1,0% du coût par mois d’un nouvel avion, les prix de location réels sont déterminés par l’offre et la demande des avions.
En outre, deux méthodes des plus courantes de financement d‘acquisition d’avions ont été évoquée. L’achat direct avec un financement bancaire par un contrat de location-exploitation (ou Crédit-Bail) / Operating leases Acquisition par crédit-bail . En clair, le leasing (ou crédit-bail) est un contrat de location à durée déterminée, avec ou sans option d’achat, qui permet à une entreprise de profiter d’un bien à moyen ou long terme sans en être propriétaire. Ce contrat de leasing est établi entre trois acteurs, à savoir: le fournisseur de matériel ; le crédit preneur, autrement dit l’entreprise, qui loue le matériel et le crédit bailleur qui se charge de financer le matériel : la société de leasing est un établissement financier.
Au titre des recommandations, il est ressorti que « les gouvernements doivent mettre l’accent sur le renforcement des Partenariats Publics-Privés (PPP), ainsi que sur le développement de partenariats avec les institutions financières et les banques de développement, afin que les entreprises du secteur aérien en Afrique Centrale puissent disposer plus facilement de capitaux nécessaires au développement de leur activité économique. »
CADRE JURIDIQUE DU TRANSPORT AERIEN EN CEMAC
Le code général du transport aérien a été particulièrement évoqué. Pour les experts, ce sont les Etats qui doivent mettre en place le cadre institutionnel approprié, ils doivent ainsi fixer le rôle de tous les acteurs. Ces Etats doivent assurer l’organisation déclinée par les textes fondamentaux : le Code Général et les Documents de Stratégie Nationale du Transport Aérien. Au demeurant, ces acteurs, notamment les institutionnels, à qui ils pourront confier des missions partielles et qui participeront de la manière qui leur semblera la plus efficace à l’administration et la gestion du domaine du Transport Aérien.
Les Etats de la CEMAC doivent donc veiller sur l’organisation du territoire et de l’espace aérien, notamment les aéroports, les services de gestion de la sécurité de la navigation aérienne. Chaque Etat doit décider de la manière de s’organiser et peut ainsi assurer directement la gestion de son espace souverain en coordonnant avec les Etats frontaliers.
Il a été précisé que l’Etat peut aussi, pour certaines raisons, créer un espace de circulation commun avec d’autres Etats limitrophes, puis co-gérer ou co-concéder. La responsabilité finale lui revenant toujours, il lui restera les prérogatives co-régulatrices et de co-supervision de la sécurité. Exemple en Afrique Centrale : l’ASECNA.
Un autre point a été fait sur la mise en place des conditions de l’exercice de la profession de transporteur aérien. On a tablé sur la création par les Etats d’entités publiques commerciales exerçant cette activité avec propension à créer un conflit d’intérêt certain, résolu par l’assurance d’un strict respect des règles édictées de concurrence, entre autres…
Au titre des recommandations, les experts se sont accordés à dire que les régulateurs doivent apporter un concours plus significatif aux acteurs qui opèrent le long de la chaine de valeur du transport aérien, pour leur permettre de comprendre, d’absorber, et de digérer plus facilement la complexité des lois et règlements en vigueur. Ils doivent nécessairement les accompagner et les coacher également pour leur permettre d’être en parfaite conformité avec les lois et règlements internationaux, régionaux et nationaux.
De même, les régulateurs doivent impérativement s’astreindre à exercer un contrôle plus strict et plus continu sur les compagnies aériennes, afin que les données (économiques, financières, techniques) qu’elles doivent produire et communiquer, soient fournies aux destinataires prévus, dans le niveau de précision et de qualité exigé, et dans les délais requis.
Pour finir, la CITAC a estimé qu’il serait souhaitable que les régulateurs exercent un contrôle plus accentué afin que le Reporting financier des compagnies aériennes soit produit dans les règles prescrites et fourni en temps opportun aux dirigeants pour maximiser l’impact et la qualité de leurs décisions. En outre, une réflexion doit être menée au niveau des Ordres des Experts Comptables Nationaux et de l’OHADA sur l’élaboration d’un système d’information financière traitant des spécificités comptables et financières des compagnies aériennes de la zone OHADA.