TRIBUNE LIBRE | Me WOUEMETAH HERVE : A propos de l’implication de l’avocat dans la dynamique de réduction des créances douteuses en zone CEMAC


Par Me Hervé WOUEMETAH | Expert en management des risques de crédit et recouvrement des créances bancaires | Avocat, chercheur 


PROPOS INTRODUCTIFS  

La problématique de l’accroissement des créances douteuses1 en zone  CEMAC est de nos jours au centre d’une profonde réflexion qui est loin d’être  achevée. Elle préoccupe tant les établissements de crédit et de microfinance que  le gouvernement même de la Banque des Etats de l’Afrique Centrale ainsi que  les différentes autorités monétaires de l’espace CEMAC. En raison notamment  des risques de contrepartie qui semblent désormais s’ériger en règle de conduite  universelle au sein des établissements assujettis. Pour cause, l’indélicatesse et la  mauvaise foi des emprunteurs, la conjoncture économique qui dicte parfois des  contraintes désagréables, la force majeure etc.  

En effet, les crédits bancaires octroyés à la clientèle et non remboursés  ont manifestement quadruplés en 10 ans dans la CEMAC, compromettant  significativement la sécurité financière des institutions prêteuses, et constituant  de ce fait une véritable exposition au risque. L’encours des créances en  souffrance dans cette sous-région a atteint 1917,7 milliards FCFA au 31  décembre 20222.  

De ce fait, il est crucial de traiter et de maîtriser ce phénomène qui met  gravement en péril l’épargne de la clientèle et la stabilité des économies  nationales. Le présent essai repose sur une approche contributive tirée de  l’implication ou de la nécessaire implication de l’avocat dans le processus  d’assainissement des mœurs financières en matière de recouvrement des  créances. Le principal questionnement qui en découle est axé sur le rôle et  l’apport de cet auxiliaire de justice dans l’accélération du processus  d’assainissement du portefeuille des engagements et la réduction des créances  douteuses au sein des établissements bancaires. Ces derniers font  habituellement recours aux services des avocats pour le recouvrement forcé de  leurs créances devant les juridictions ; corrélativement les débiteurs visés par les procédures de recouvrement forcé en question sollicitent les services des  avocats pour leur assistance technique ou leur représentation devant lesdites  juridictions. L’avocat est donc au centre des procédures de recouvrement forcé  des créances et joue à ce titre un rôle majeur qui mérite d’être explicité et  renforcé. 

Par ailleurs, en vertu du serment de l’avocat par lequel il jure d’officier en  toute conscience3, cet acteur indéniable du système judiciaire devrait  accompagner utilement son client débiteur dans la perspective du  remboursement effectif des sommes dues. La recherche permanente des  solutions liées à la reconstitution des dépôts de la clientèle - dont une partie a  été employée à titre de crédit que son client débiteur n’a pas remboursé - doit  guider principalement son action. 

L’avocat qui s’obstine - en dépit du caractère exigible, certain et liquide de  la créance bancaire - à vouloir à tout prix soustraire le débiteur - qu’il assiste dans  une procédure de recouvrement forcé - de ses obligations de paiement, à la  faveur des exceptions tendant à l’annulation de l’accord de prêt, est assurément  entrain de poser sa pierre à la dégradation de la situation des créances  douteuses et à la mise en péril de l’épargne publique. 

S’il est vrai que sa mission traditionnelle est d’assurer la défense des  intérêts du justiciable, il n’en reste pas moins vrai que sa qualité d’auxiliaire de  la justice lui impose d’être juste et de soutenir les idéaux de la justice. Qui plus  est, la conscience qui l’interpelle en tout lieu et en tout temps et qu’il a juré dans  son serment d’observer indéfiniment, en respectant les règles déontologiques  issues des lois organiques régissant la profession, ne lui permettrait pas de  soutenir les débiteurs dans leur indélicatesse. 

« L’avocat peut toujours s’imposer les devoirs particuliers que lui dicte sa  conscience. Mais, comme on l’observait déjà jadis, il ne saurait ne connaître  qu’elle sans égard à l’opinion, aux usages et aux règlements de l’Ordre; des  sources extérieures lui fixent les principales obligations de son état, en même  temps qu’elles constituent pour lui des repères indispensables: la loi tout d’abord,  comprise non au sens formel, mais matériel, c’est-à-dire incluant les textes  réglementaires pris pour l’application des textes d’origine parlementaire »4

Il pèse en effet sur l’avocat une obligation morale de haut niveau dictée  par la préservation ou sa contribution à la préservation de l’intérêt général et de  l’épargne du public qui en découle. Cette épargne étant constituée des sommes  que les honnêtes gens ont déposées dans leurs comptes domiciliés dans les livres  de la banque. 

Cela dit, nous évoquerons successivement le rôle et l’implication de l’avocat  en tant que défenseur des intérêts du débiteur indélicat (I) et en qualité de  défenseur des intérêts de l’établissement de crédit ou de microfinance (II). 

I- LE ROLE ET L’IMPLICATION DE L’AVOCAT DEFENSEUR DES INTERETS  DU DEBITEUR INDELICAT DANS LA DYNAMIQUE DE REDUCTION DES  CREANCES DOUTEUSES 

Dans le cadre de l’assistance ou de la représentation en justice de son client  débiteur subissant une procédure de recouvrement, l’avocat devrait accomplir  des diligences utiles qui visent non seulement à assainir la relation d’affaires  entre les parties au procès mais aussi à la préserver. Au regard de l’objectif  majeur pris de la protection générale des dépôts de la clientèle. 

A) Vérifier l’exigibilité, la certitude et la liquidité de la créance 

Ces trois critères sont en réalité caractéristiques de la nature du compte  courant dont le solde n’est exigible qu’à la clôture5. L’absence du procès-verbal de clôture juridique du compte retire à la créance son caractère exigible, liquide  et certain et déterminera dans ces conditions l’avocat à se rapprocher du  créancier pour obtenir que le compte soit clôturé suivant les règles de l’art. Après  l’accomplissement de cette formalité, il pourra solliciter un délai de grâce. 

B) Solliciter un délai de grâce  

Lorsque la créance revêtira les caractères de certitude, de liquidité et  d’exigibilité, l’avocat pourra solliciter auprès du créancier de son client débiteur,  au nom et pour le compte de celui-ci, un délai de grâce6 qui lui permettrait de  s’exécuter dans un temps raisonnable. Il sera au préalable investi de la mission  de conscientisation du débiteur indélicat 7qui ne consentirait pas a priori à régler  sa dette pour ainsi faciliter la réalisation de l’action en délai de grâce qui sera  formulée d’abord amiablement et le cas échéant par devant la juridiction  compétente. 

C) Négocier avec la banque le rééchelonnement de la dette ou une remise  partielle de celle-ci  

L’avocat est en outre habilité - lorsque son client débiteur est dans la  perspective du paiement8- à provoquer auprès de la banque et sous réserve du  respect des normes prudentielles, un rééchelonnement9 ou même une  restructuration des engagements de son client débiteur dont le potentiel  économique n’est pas irrémédiablement compromis. Dans certains cas, il  déterminera son client en lui expliquant les enjeux, à négocier l’extinction de la  dette moyennant remise partielle de celle-ci et règlement total du reliquat. 

La pratique qui consiste pour l’avocat à déterminer son client débiteur à  couper tous les ponts avec l’établissement bancaire créancier qui a initié une  procédure de recouvrement forcé et à déconseiller toute offre de paiement qui  hanterait l’esprit du débiteur – au motif qu’il faut aller jusqu’au terme de la  procédure ainsi entamée - n’est pas recommandée. 

D) Solliciter la reddition de compte  

La reddition de compte pourra s’imposer si la lecture technique des écritures  inscrites au débit et au crédit du compte du débiteur, laisse entrevoir des erreurs  matérielles qui se seraient glissées du fait de la banque. Cet exercice qui est  plausible pour les avocats spécialistes des questions financières et qui maîtrisent  la complexité des opérations ou écritures bancaires, posera quelques difficultés  aux avocats de formation générale, non dotés de compétences spécifiques en  matière bancaire. 

La reddition qui s’opère par les experts dont le choix est effectué soit d’accord  partie soit par le tribunal compétent saisi à cet effet, déterminera l’étendue  réelle des engagements du débiteur. Les conclusions de l’expert financier  consolidant ou aménageant l’étendue des engagements en question devront  ainsi déterminer l’avocat à formuler au nom et pour le compte de son client  débiteur des propositions utiles (délai de grâce, protocole d’accord  transactionnel pour les créances reposant sur des conventions sous seing privé,  remise partielle de dette moyennant offre de paiement du reliquat). 

E) Ne pas initier des procédures à tête chercheuse  

Le contentieux est la phase de recouvrement forcé de la créance qui requiert  la participation de l’avocat à l’œuvre de la justice. « Il est fréquent qu’à l’occasion  d’audiences de rentrée les présidents de juridiction s’adressent aux avocats  comme étant leurs partenaires de justice. L’expression n’est dans aucun texte,  mais elle vise à marquer courtoisement qu’au-delà du service rendu au  justiciable, l’avocat soulage souvent le juge en lui épargnant les explications  embrouillées des clients ou des documents inutiles, parfois même poisseux. Ce  travail de tri ou de traduction qui caractérise tout montage d’un dossier clair et  présentable, facilite et accélère à l’évidence la prise de la décision »10.  

En outre l’avocat du débiteur n’a pas à intenter absolument une action en  contestation lorsque son client reconnaît être redevable et quand bien même il  semblerait ne pas le reconnaître, il serait indiqué de se rapprocher de la banque  pour des vérifications d’usage. Cette démarche est fortement appréciée par les  établissements prêteurs. 

  • S’opposer systématiquement à un commandement aux fins de saisie  immobilière qui a été signifié au débiteur, ne contribue pas malheureusement à  assainir la situation, encore moins à résoudre le problème de fond.  
  • Agir en main levée d’une mesure d’exécution forcée ou conservatoire alors que le débiteur ne conteste pas le fondement et le principe de la créance,relève  d’une aberration juridique qui ne peut que renforcer l’abdication des  établissements bancaires et constituer une menace sérieuse à la protection de  l’épargne publique. 
  •  Assigner en nullité d’une convention de prêt - dont le débiteur ne conteste  pas le principe et le fondement de la créance - participe davantage d’une  contribution à saper l’épargne publique non sans heurter la conscience. 

F) Orienter le débiteur vers une dation en paiement 

La dation en paiement 11est une opération juridique par laquelle en  règlement de tout ou partie du montant de sa dette, le débiteur cède la propriété  d’un bien ou d’un ensemble de bien lui appartenant. C’est un mode de  recouvrement de créance qui revêt toute son efficacité. L’avocat qui détermine  son client débiteur à s’exécuter de son obligation par le truchement d’une dation  en paiement agit en droite ligne avec son devoir de conscience. 

II- LE ROLE ET L’IMPLICATION DE L’AVOCAT DEFENSEUR DES INTERETS  DE L’ETABLISSEMENT BANCAIRE DANS LA DYNAMIQUE DE  REDUCTION DES CREANCES DOUTEUSES  

L’assainissement des mœurs financières et la réduction du volume croissant  des créances douteuses en zone CEMAC est un objectif qui doit interpeller à plus  d’un titre l’avocat en charge de la défense des intérêts des établissements  bancaires devant les juridictions.  

Au-delà de cet accompagnement qui s’opère dans la pratique exclusivement  sous le prisme de la gestion contentieuse (B) l’avocat devrait capitaliser sa  qualité de conseil en fournissant en amont aux établissements bancaires des  outils techniques pour asseoir une meilleure gestion prédictive des risques de  crédit (A) 

A- L’avocat comme conseil  

Historiquement, «l’avocat n’a jamais été cantonné au palais. Seule profession  longtemps à garantir au public que ses membres étaient au minimum maîtres en  droit, les avocats avaient toute compétence scientifique et toute permission  déontologique de consulter ou de conseiller. Des consultations gratuites pour les  indigents étaient d’ailleurs assurées au siècle dernier avant même toute création  d’un système d’assistance judiciaire. Le public a cependant largement négligé de  recourir aux conseils préventifs des avocats qui n’étaient consultés qu’une fois le  litige révélé. Eux-mêmes aussi ont longtemps dédaigné de se mettre à disposition  du monde des entreprises pour bâtir des contrats, constituer des sociétés, assurer  le montage juridique des opérations que nécessite la vie des affaires….. 

L’idée d’assistance, déjà rencontrée en matière judiciaire, implique plus  généralement que l’avocat mette au profit d’autrui sa compétence et son  expérience. L’avocat peut donc consulter ou conseiller, par oral ou par écrit, et  on ne s’adresse jamais trop tôt à lui si l’on veut prévenir une difficulté ou un litige.  Certains avocats limitent d’ailleurs leur activité à ce rôle préventif ».12 

Le principal défi qui interpelle les établissements bancaires dans la gestion de  leurs engagements est la mise en place des politiques préventionnistes pour  éviter la survenance des impayés et la constitution des provisions. 

A ce titre, l’avocat qui est le conseil par excellence doit influencer ce dispositif  à la faveur de son expertise qui consistera à : 

  • Questionner la pertinence du manuel des procédures de crédit et de  recouvrement de l’organisation en y apportant en tant que de besoin des  aménagements pour une plus grande efficacité des politiques de crédit et  de recouvrement ; 
  • Assurer la formation des personnels de l’établissement bancaire sur la  gestion prédictive des risques liés au crédit et au recouvrement des  créances ; 
  • Elaborer les modèles de convention de crédit /Mettre à la disposition de  l’établissement bancaire les différents modèles de convention à faire  valider par les notaires lorsqu’il s’agit des conventions hypothécaires ; 
  • Participer aux comités de stratégies de l’établissement bancaire lorsque la  thématique est axée sur le crédit et le recouvrement ; 
  • Inciter le recours à l’arbitrage ou à la médiation en vulgarisant les  avantages de la justice alternative13 et formuler les clauses d’arbitrage ou  de médiation que l’établissement bancaire insèrerait dans les différentes  conventions de crédit. 

B- L’avocat et le contentieux du recouvrement des créances  

La mission de l’avocat dans le cadre du recouvrement forcé de la créance de  l’établissement bancaire est salutaire. Il doit notamment accomplir les diligences  ci-après pour une plus grande satisfaction des intérêts de la banque. 

  • Vérifier que la créance objet du recouvrement forcé entrepris est certaine,  liquide et exigible ; 
  • Vérifier que le débiteur a été mis en demeure de payer ; 
  • Elaborer une fiche technique indiquant les forces et les faiblesses du  dossier, fiche qui doit être communiquée à l’établissement bancaire qui  doit en déposer une copie dans le dossier tenu à la banque ; 
  • En cas de réponse affirmative aux deux premiers points, saisir par acte  d’avocat14. Le débiteur pour l’informer de ce qu’il a été constitué par  l’établissement bancaire pour le recouvrement forcé de la créance, en  l’invitant d’une part à se rapprocher de son cabinet pour évoquer de vive  voix le dossier ou d’autre part à lui communiquer les téléphone et adresse  de son avocat pour prise de contact et évocation du dossier. L’objectif ici  étant de déterminer une dernière fois le débiteur à s’exécuter  amiablement à travers un plan de remboursement assorti par exemple du règlement d’un acompte, en lui excipant toutes les conséquences  fâcheuses qui seraient liées à la mise en œuvre à son encontre d’une  procédure de recouvrement forcé ; 
  • Déclencher la procédure de recouvrement forcé lorsque le débiteur  convoqué et reçu est dans l’incapacité matérielle de payer la dette ou peut  bien le faire mais ne veut pas ; 
  • Communiquer systématiquement à l’établissement bancaire les projets  de conclusions pour observations éventuelles et/ou validation  préalable15
  • Les comptes rendus d’audience doivent obéir à un système de  communication électronique16
  • Effectuer au profit de l’établissement bancaire - dans une fréquence  semestrielle - des reportings commentés sur la situation globale des  dossiers de procédure et les grandes tendances afférentes.
  • Eviter les renvois (au moins deux) pour les mêmes motifs pris des attentes  des écritures de l’établissement bancaire. 

CONCLUSION 

L’avocat est un acteur majeur pour l’amélioration de la qualité du  portefeuille des engagements au sein des établissements assujettis. Son  expertise permet à ceux-ci de se prémunir contre la survenance des risques de  contrepartie, mais aussi de recouvrer efficacement devant les juridictions  compétentes les créances douteuses ; autant qu’elle le prédispose à  accompagner utilement son client débiteur dans la perspective du règlement de  la dette. Certes, « les difficultés de réalisation des sûretés en justice sont  généralement imputables à tous les acteurs du système. Il s’agit principalement  des problèmes de mise en jeu des garanties en justice et des faiblesses du système  judiciaire. Mais aussi au manque de maîtrise dans la préparation et la  formalisation des dossiers de garantie par les services juridiques des  établissements de crédit. Les procédures légales de recouvrement et de  réalisation des garanties sont longues et coûteuses. Les recours dilatoires et les  demandes de report d’audience par des débiteurs malhonnêtes sont souvent mal  traités par les tribunaux notamment dans le cadre de la mise en œuvre des  hypothèques et des procédures d’injonction de payer dites simplifiées. Et selon  l’Association des Professionnels des Etablissements de crédit du Cameroun, il  n’existe pas de magistrats ou de tribunaux dédiés au contentieux commercial,  financier et bancaire, qui reste de la compétence des tribunaux ordinaires. Le  contentieux commercial et financier est examiné par des magistrats souvent  généralistes qui ne maîtrisent pas toujours certaines subtilités du droit  bancaire »17.  

Mais il reste que l’avocat devrait contribuer à pallier cette insuffisance en  développant sous le prisme de sa probité, sa conscience et de sa qualité  d’auxiliaire de la justice, de bonnes pratiques qui viseraient à déterminer les  débiteurs indélicats qu’il est appelé à défendre ou à assister, à s’exécuter de  leurs obligations de paiement, quoique la procédure de recouvrement forcé ait  été déjà mise en œuvre. 

Le législateur OHADA a été notamment influencé par cette approche  protectionniste des dépôts de la clientèle lorsqu’il donne aux parties à une convention hypothécaire dans le cadre des modes alternatifs de réalisation des  garanties, la faculté de reverser au profit du constituant18, l’excédent entre la  valeur de l’immeuble affecté en garantie et le montant de la créance ; toute  chose qui en dépit de l’équité qu’elle regorge, facilite la mise en œuvre du  recouvrement et l’extinction de la créance douteuse dans les livres de  l’établissement bancaire créancier. 

Pareillement, la Cour Commune de Justice et d’Arbitrage n’est pas restée  en marge de cette mouvance de protection des dépôts de la clientèle lorsqu’elle  affirme que les formalités prévues par les dispositions des articles 254, 267, 277  et 297 alinéa 2 de l’Acte Uniforme portant organisation des Procédures  Simplifiées de Recouvrement des Créances et des Voies d’Exécution ne sont  sanctionnées par la nullité que si l’irrégularité a eu pour effet de causer un  préjudice aux intérêts de celui qui l’invoque19

En tout état cause, des solutions plausibles pourraient contribuer à  renforcer le rôle et l’implication de l’avocat dans la dynamique de réduction des  créances douteuses.  

D’abord la création et la mise en place des centres de formation aux  métiers de la finance permettrait aux avocats qui entendent se spécialiser pour  performer dans leur domaine (contentieux bancaire, marché financier,  contentieux des assurances), de s’abreuver substantiellement des règles qui  gouvernent le fonctionnement des établissements de crédit, pour ensuite cerner  fondamentalement les enjeux liés à la sécurisation des dépôts au sein des  établissements bancaires, tant sur le plan micro économique que sous l’angle  macro-économique. Une telle approche les doterait davantage d’outils  techniques pour accompagner efficacement leurs clients constitués  d’établissements bancaires, dans la gestion prédictive et contentieuse des  risques de crédit. 

Ensuite la mise en place d’un cadre de concertation entre la Commission  Bancaire d’Afrique Centrale soutenue par les autorités monétaires nationales et  les différents Barreaux serait salutaire pour l’assainissement du contentieux de  recouvrement des créances bancaires. Ce cadre serait volontiers élargi aux magistrats pour l’évocation des problématiques qui fâchent et l’adoption des  solutions idoines. 

Par Me Hervé WOUEMETAH | Expert en management des risques de crédit et recouvrement des créances bancaires | Avocat, chercheur 

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  1. Les créances douteuses sont des créances dont le remboursement ou le paiement par les débiteurs n’est pas effectué après l’expiration de la période de remboursement. Elles sont un enjeu de taille pour le système bancaire d’un pays car elles réduisent la profitabilité des banques 
  2. Revue de stabilité financière de la BEAC pour le compte de l'exercice 2022, publiée au 08 janvier 2024
  3. Loi N°90/059 du 19 décembre 1990 régissant la profession d’avocat au Cameroun, « je jure comme avocat d’exercer mes fonctions de défense et de conseil en toute indépendance avec dignité, conscience, probité et humanité, conformément aux règles de ma profession et dans le respect des cours et tribunaux et des lois de la République ». En France, le nouveau serment remanié par la loi du 31 décembre 1990 stipule l’exercice des fonctions « avec dignité, conscience, indépendance, probité et humanité »
  4. Jean-Jacques Taisne, in La déontologie de l’avocat ; 6ème édition, Dalloz 
  5. La matérialité de la clôture se traduira dans la pratique par la signature d’un procès - verbal de clôture juridique de compte. Elle doit être en principe contradictoire ou à défaut présumée comme tel.
  6. Un délai de grâce est une période définie après la date d’échéance pendant laquelle le paiement peut être effectué sans pénalité 
  7. Débiteur qui peut payer et ne veut pas s’exécuter 
  8. Puisqu’il doit orienter son client débiteur vers cet idéal de paiement 
  9. Le rééchelonnement consiste à réaménager les échéances de remboursement de la dette sur une période plus longue que celle qui était prévue antérieurement tandis que la restructuration consiste à regrouper tous les crédits du débiteur en un seul afin de n’avoir plus qu’à rembourser un unique prêt dont les mensualités sont plus  faibles.
  10. Jean-Jacques Taisne, idem.
  11. La dation en paiement est une opération juridique par laquelle, en règlement de tout ou partie du montant  de sa dette, un débiteur cède la propriété d’un bien lui appartenant.
  12. Jean-Jacques Taisne, idem
  13. Célérité, confidentialité, expertise, transaction
  14. La commission Darrois en France voudrait même qu’on puisse consacrer en législation l’acte d’avocat, en le tenant pour légalement reconnu au sens de l’article 1322 du Code civil et en lui attribuant entre les parties la  même force probante que l’acte authentique 
  15. Les délais de communication et de validation sont régis par le manuel des procédures de recouvrement,  notamment dans le chapitre traitant de la relation d’affaires entre la banque et les avocats
  16. idem
  17. Stratégie Nationale de Développement du Secteur Financier du Cameroun 2024-2030
  18. Article 200 alinéa 2 Acte Uniforme OHADA sur les sûretés « Si la valeur de l’immeuble excède le montant de  la créance garantie, le créancier doit au constituant une somme égale à la différence… »
  19. Arrêt N°032/2024 du 1er février 2024, Affaire Monsieur YOMNIE Jean – Baptiste et Mme YOMNIE née LOWE  MUKAM Marie Chantal C/ La Mutuelle Communautaire de Croissance de Bandjoun  
Me WOUEMETAH Hervé (c)