CEMAC : La COBAC enjoint aux banques de surseoir au transfert des avoirs en déshérence à la Caisse de dépôts et consignations camerounaise ( Episode 1)


Par la rédaction |


Cette injonction a été servie par la lettre de son nouveau secrétariat général Marcel ONDELE, avec pour référence LC-COB/ 34 DREGRI/DRNM/TPO signée à Libreville, le 11 juillet 2024 et adressée aux Directeurs Généraux des Etablissements de crédit, des Etablissements de microfinance et des Etablissement de paiement. Le motif est pris de ce qu’aucune définition de droit communautaire n’a été donnée sur la nature et les modalités de ces avoirs.  

De GàD SG COBAC M. ONDELE vs DG CDEC M. OBAM

L’objet de cette lettre avec ampliation à la CDEC du Cameroun est clair : Transfert des avoirs en déshérence à la Caisse des Dépôts et Consignations (CDEC) du Cameroun, et son contenu l’est encore plus : « Madame, Monsieur le Directeur Général, Par décret n°2023/08500/PM du 1er décembre 2023 fixant modalités de transfert des fonds et valeurs dévolus à la Caisse des Dépôts et Consignations (CDEC) du Cameroun, les Autorités nationales ont demandé aux établissements de crédit, de microfinance et de paiement de transférer à la CDEC les avoirs dits en déshérence.

Y faisant suite, je voudrais porter à votre attention que ce transfert nécessite préalablement la clarification de la nature de ces avoirs, ainsi que la définition des modalités de conservation, de gestion, voire de restitution de ces valeurs. A ce jour, il n'existe pas dans la Communauté Economique et Monétaire de l'Afrique Centrale (CEMAC) un cadre réglementaire régissant les points sus évoqués, hormis des règles relatives au traitement comptable de ces avoirs.

La COBAC a engagé des travaux visant à encadrer, au plan communautaire, le traitement par les établissements de crédit, de microfinance et de paiement, des avoirs en déshérence et de leur transfert aux institutions habilitées. Cet encadrement permettra de préserver la stabilité financière dans la CEMAC, de maîtriser les risques opérationnels liés à la conservation et la gestion de ces valeurs, ainsi que les risques de contentieux entre les institutions nationales, les institutions financières et les titulaires de ces avoirs ou leurs ayants droit.

Eu égard à tout ce qui précède, je vous demande de sursoir au processus de transfert des avoirs en déshérence au profit de la CDEC du Cameroun en attendant la clarification des points susmentionnés. »

DROIT NATIONAL CONTRE DROIT COMMUNAUTAIRE

La source contextuelle de cette situation s’ancre dans la mise en place effective d’une caisse de dépôts et consignations après le Gabon et le Congo. Si cette caisse est née dans les textes en 2008, c’est la teneur du décret n° 2023/08500 du 1er décembre 2023 fixant les modalités de transfert des fonds et valeurs à la Caisse de dépôts et Consignations qui fait réagir la COBAC. Le gendarme bancaire ne semble pas d’accord avec « la nature des avoirs en déshérence ainsi que les modalités de conservation, de gestion, voire de restitution de ces valeurs » telles que fixées par le législateur camerounais.

A titre illustratif, les dispositions de l'article 3 du décret n° 2023/08500 du 1er décembre 2023 fixant les modalités de transfert des fonds et valeurs à la Caisse de dépôts et Consignations au Cameroun apportent une définition tranchée de la notion de compte bancaire inactif. Le compte courant inactif y est compris comme un compte bancaire individuel créditeur qui n’a enregistré aucune opération autre que celles initiées par la banque (perception de frais et commissions, versement d’intérêts) pendant plus de douze (12) mois. La période d’observation des comptes courants par un établissement bancaire ou de crédit est de cinq (05) ans à partir de la constatation de l’inactivité avant sa transmission à la CDEC. Allant plus loin, le décret de 2023 précise également les modalités de ce transfert, chose qui n’est visiblement pas en accord avec la conception des choses de la COBAC.

Au demeurant, le Cameroun par sa CDEC se doit de s’aligner sur cette injonction de la COBAC sauf à provoquer un conflit de « normes » (la norme communautaire est cependant ‘’supérieure’’ à la norme nationale).  

Les établissements de crédit, de microfinance et de paiement étant donc sommés, la CDEC doit en principe poursuivre le « recouvrement » et éventuellement les sanctions sur les autres dépositaires et consignataires à l’instar des notaires ou des sociétés d’assurance placées sous le régime de la CIMA et relativement à des avoirs découlant des polices d’assurances et répondant à la définition et aux règles de transfert camerounaises des avoirs en déshérence.