FRANCE | AFFAIRE PAD C. DIT SA : Les sentences de la Cour Internationale d'Arbitrage de la CCI de Paris annulées en appel


Par la rédaction |


La Cour d'Appel de Paris a rendu, en date du 3 décembre 2024, deux arrêts majeurs dans cadre du différend opposant le Port Autonome de Douala à la société Douala International Terminal (DIT) SA. 

Une vue du terminal du PAD à Douala au Cameroun (c) Loic NITCHEU

Ces arrêts annulent la sentence arbitrale finale du 9 novembre 2021, ainsi que l'addendum et la sentence additionnelle du 15 avril 2022, rendus par la Cour Internationale d'Arbitrage de la Chambre de Commerce International de Paris, composée de manière irrégulière. Ces sentences concernaient le différend opposant le Port Autonome de Douala à la société Douala International Terminal (DIT) SA.

Pour mémoire, le Port Autonome de Douala avait été condamné à verser à Douala International Terminal SA, l'ancien concessionnaire du Terminal à Conteneurs du Port de Douala-Bonabéri, respectivement 28 312 230 118,3 FCFA et 8 921 779 485,61 FCFA, soit un montant total de 37 234 009 598,8 FCFA. Ces sommes étaient destinées à indemniser la société Douala International Terminal SA, pour des contestations liées, entre autres, aux conditions de transfert des salariés, à la reprise du matériel nécessaire à la poursuite des activités du terminal à conteneurs, au rachat des stocks, à la gestion des engagements juridiques du concessionnaire, ainsi qu'aux modalités de passation du site à la fin de la concession le 31 décembre 2019.

Le Port Autonome de Douala accueille avec satisfaction ces décisions salutaires, qui confirment les irrégularités relevées dans la composition du Tribunal arbitral et l'absence des garanties fondamentales d'impartialité et d'indépendance nécessaires à une justice équitable et crédible.

INTEGRALITE DE L'UN DES ARRETS 

REPUBLIQUE FRANCAISE AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS -  COUR D’APPEL DE PARIS - Chambre commerciale internationale POLE 5 CHAMBRE 16

ARRET DU 03 DECEMBRE 2024 (n° 95 /2024 , 8 pages) - Numéro d’inscription au répertoire général :  N° RG 22/01748 - N° Portalis 35L7-V-B7G-CFDCO

Décision déférée à la Cour : sentence finale rendue par le tribunal arbitral le 9 novembre 2021sous l’égide du règlement d’arbitrage de la Chambre de commerce internationale, dans l’affaire enregistrée sous la référence n°24211/DDA/AZO

  • DEMANDERESSE AU RECOURS : PORT AUTONOME DE DOUALA (PAD) - société anonyme à capital public ayant l’Etat comme unique actionnaire - immatriculée au Registre du Commerce de DOUALA sous le n°RC/DLA/2003/B/030153, ayant son siège : Centre des Affaires Maritimes - DOUALA – BONANJO, Boîte Postale 4020 DOUALA (CAMEROUN) - prise en la personne de ses représentants légaux, Ayant pour avocat postulant : Me Frédérique ETEVENARD, avocat au barreau de PARIS, toque : K0065 - Ayant pour avocats plaidants : Me Gill DINGOMÉ de la SELARL DINGOME NGANDO & ASSOCIE, avocat au barreau de PARIS, toque : K0027 ; Me Charles Christian ONDOUA, avocat au barreau du CAMEROUN ; Me AMAD Tijan KOUOTOU, avocat au barreau du CAMEROUN

 

  • DEFENDERESSE AU RECOURS : DOUALA INTERNATIONAL TERMINAL (DIT) - société de droit camerounais, ayant son siège social : Vallée Tokoto (Zone des professions maritimes), BP 3945, DOUALA (CAMEROUN) prise en la personne de ses représentants légaux, Ayant pour avocat postulant :    Me Luca DE MARIA de la SELARL PELLERIN - DE MARIA - GUERRE, avocat au barreau de PARIS, toque : L0018 Ayant pour avocats plaidants : Me Benjamin SIINO, Me Teresa VEGA et Me François BORDES, de l’AARPI GAILLARD BANIFATEMI SHELBAYA SIINO, avocats au barreau de PARIS, toque : R257

 

COMPOSITION DE LA COUR : L’affaire a été débattue le 04 Novembre 2024, en audience publique, devant la Cour composée de : 

Daniel BARLOW, Président de chambre ; Mme Fabienne SCHALLER, Présidente de chambre ; Jacques LE VAILLANT, Conseiller qui en ont délibéré.

Un rapport a été présenté à l’audience par Mme Fabienne SCHALLER dans les conditions prévues par l’article 804 du code de procédure civile. 

Greffier, lors des débats : Mme Najma EL FARISSI

 

ARRET :

  • contradictoire
  • prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.
  • signé par Daniel BARLOW, président de chambre et par Najma EL FARISSI, greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

 

I/ FAITS ET PROCEDURE

  1. La cour est saisie d'un recours en annulation contre une sentence finale rendue le 9 novembre 2021 sous l'égide de la CCI (n°24211/DDA/AZO) entre la société Douala International Terminal (ci-après « la société DIT »), une société de droit camerounais qui a pour mission de gérer, d'exploiter et de développer l'activité de manutention de conteneurs du port de Douala, et la société Le Port Autonome de Douala (ci-après « la société PAD » ou « le PAD »), société anonyme à capital public ayant l'Etat camerounais comme unique actionnaire, qui assure la gestion, la promotion et le marketing du port de Douala.
  2. Par cette sentence finale, le tribunal arbitral a statué en ces termes :

Sur le respect de l’Acte de mission du 15 mai 2019:

DÉCLARE que le Tribunal arbitral est compétent pour connaître des questions liées aux conditions de transfert des salariés, de reprise du matériel nécessaire à la poursuite des activités sur le terminal, de reprise des engagements juridiques du concessionnaire, de mise en œuvre de l'inventaire et du rachat des stocks, ainsi que des modalités de « cut off » et de recouvrement des créances de DIT et plus généralement de l'organisation de la passation du site à la fin de la concession, et que ces questions entrent dans le champ de l'Acte de mission ;

Sur l'exclusion du Second Rapport Expertises Galtier :

DÉCIDE qu'il n'y a pas lieu d'écarter les rapports d'experts produits par le Demandeur ; Sur le transfert des biens de retour :

ORDONNE au PORT AUTONOME DE DOUALA de verser à DOUALA

INTERNATIONAL TERMINAL la somme de 559.568.000 FCFA pour les investissements réalisés sur le portique n° 1 et 93.086.400 FCFA pour les investissements réalisés sur le portique n° 2, soit la somme totale de 652.654.400 FCFA ;

ORDONNE le paiement d'intérêts de retard à compter du 30 juin 2020 au taux d'intérêt des appels d'offres (TIAO) de la Banque des États de l'Afrique Centrale sur la somme de 652.654.400 FCFA au titre du transfert des biens de retour ;

Sur le transfert des biens de reprise :

DÉCLARE que le transfert de propriété sera parfait lorsque DOUALA INTERNATIONAL TERMINAL aura obtenu le paiement des différentes indemnisations ordonné par la présente Sentence au titre du transfert des biens en fin de Concession ;

ORDONNE au PORT AUTONOME DE DOUALA de verser au Demandeur la somme de 4.868.176.000 FCFA pour le portique n° 3;

ORDONNE  au  PORT  AUTONOME  DE  DOUALA  d'indemniser  DOUALA

INTERNATIONAL TERMINAL à hauteur de 2.296.000.000 FCFA pour les quatre portiques de quai RTG ;

ORDONNE  au  PORT  AUTONOME  DE  DOUALA  d'indemniser  DOUALA

INTERNATIONAL TERMINAL à hauteur de 1.632.000 EUR au titre des deux grues;

CONSTATE l'accord des Parties sur l'indemnisation du véhicule spécialisé ainsi que du bien n° 3806 « FAB PALETTES POS FUTS)) et ORDONNE au PORT AUTONOME

DE DOUALA d'indemniser DOUALA INTERNATIONAL TERMINAL à hauteur de 5.467.823 FCFA;

ORDONNE au PORT AUTONOME DE DOUALA de verser à DOUALA

INTERNATIONAL TERMINAL la somme de 358.128.000 FCFA au titre de l'indemnisation des autres véhicules ;

ORDONNE le paiement par le PORT AUTONOME DE DOUALA de la somme suivante de 2.060.864.814,73 FCFA au titre de la reprise des équipements de manutentions et groupes électrogènes à DOUALA INTERNATIONAL TERMINAL ;

ORDONNE au PORT AUTONOME DE DOUALA de payer la somme de 830.102.400 FCFA à DOUALA INTERNATIONAL TERMINAL au titre des matériels CCTV, IT, télécom, conteneurs aménagés et autres biens ;

ORDONNE le paiement d'intérêts de retard à compter du 31 décembre 2019 au taux d'intérêt des appels d'offres (TIAO) de la Banque des États de l'Afrique Centrale sur les sommes précitées au titre du transfert des biens de reprise ;

Sur le transfert des biens propres :

ORDONNE au PORT AUTONOME DE DOUALA de procéder au paiement de 294.015.259 FCFA à DOUALA INTERNATIONAL TERMlNAL au titre du matériel de bureau, du matériel informatique et des serveurs informatiques ;

ORDONNE au  PORT  AUTONOME  DE DOUALA d'indemniser  DOUALA

INTERNATIONAL TERMINAL à hauteur de 262.225.566 FCFA au titre des travaux d'aménagement du local de facturation ;

ORDONNE le paiement d'intérêts de retard à compter du 31 décembre 2019 au taux d'intérêt des appels d'offres (TIAO) de la Banque des États de l'Afrique Centrale sur la somme totale de 556.240.825 FCFA au titre du transfert des biens propres ;

Sur les stocks :

ORDONNE  au  PORT  AUTONOME  DE  DOUALA  d'indemniser  DOUALA

INTERNATIONAL TERMINAL à hauteur de 3.973.187.515 FCFA (hors taxes) pour les stocks ;

Sur les prestations fournies par DIT avant le 31 décembre 2019 ou cut-off: ORDONNE au PORT AUTONOME DE  DOUALA de verser à DOUALA

INTERNATIONAL TERMINAL la somme de 4.640.461.442 FCFA (hors taxes), au titre des prestations fournies aux usagers du terminal à conteneurs du port de Douala jusqu'au 31décembre 2019 et non facturées par DOUALA INTERNATIONAL TERMINAL ;

ORDONNE le paiement d'intérêts de retard à compter du 6 février 2020 au taux d'intérêt des appels d'offres (TIAO) de la Banque des États de l'Afrique Centrale sur la somme de 4.640.461.442 FCFA au titre des prestations fournies par DIT avant le 31 décembre 2019 ;

Sur la mise à disposition du personnel de DOUALA INTERNATIONAL TERMINAL :

ORDONNE au PORT AUTONOME DE DOUALA de rembourser à DOUALA INTERNATIONAL TERMINAL les coûts de mise à disposition de son personnel au mois de décembre 2019 à hauteur de 5.183.994 FCFA (hors taxe) ;

ORDONNE le paiement d'intérêts de retard à compter du 31janvier 2020 au taux d'intérêt des appels d'offres (TIAO) de la Banque des États de l'Afrique Centrale sur la somme de 5.183.994 FCFA au titre de la mise à disposition du personnel de DOUALA INTERNATIONAL TERMINAL ;

Sur la demande reconventionnelle du PORT AUTONOME DE DOUALA relative au bilan de clôture :

REJETTE la demande reconventionnelle du PORT AUTONOME DE DOUALA sollicitant du Tribunal arbitral qu'il ordonne à DOUALA INTERNATIONAL TERMINAL de produire un véritable bilan de clôture conforme à l'article 28 de la Convention de concession ;

Sur la mainlevée des cautionnements :

ORDONNE la mainlevée par le PORT AUTONOME DE DOUALA des cautionnements n° 4343GM00117 et n° 4343GM00109 et la condamnation du PORT AUTONOME DE DOUALA aux frais afférant au maintien du cautionnement n°4343GM00117 au-delà de la période prévue contractuellement, soit 1.499.680 FCFA (hors taxe) à verser à DOUALA INTERNATIONAL TERMINAL ;

Sur la demande reconventionnelle afférente à la remise en l'état des biens concédés :

REJETTE les demandes reconventionnelles du PORT AUTONOME DE DOUALA sur la remise en état du domaine public concédé et des équipements car le PORT AUTONOME DE DOUALA n'a pas suffisamment motivé ses demandes ;

Sur le préjudice moral des Parties :

REJETTE les demandes des Parties sur le paiement de dommages-intérêts au titre de leur prétendu préjudice moral respectifs, qui n'est pas caractérisé ;

REJETTE la demande du PORT AUTONOME DE DOUALA de condamner DOUALA INTERNATIONAL TERMINAL à la somme de 2.000.000.000 FCFA à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive et vexatoire.

En tout état de cause,

CONDAMNE  le PORT  AUTONOME  DE  DOUALA à  payer  à DOUALA

INTERNATIONAL TERMINAL 433.710 EUR au titre des Coûts de l'arbitrage et à verser  1.143.302,82  EUR  à  DOUALA  INTERNATIONAL  TERMINAL  en

remboursement partiel des frais que celui-ci a exposés pour sa défense ;

REJETTE toutes autres demandes des Parties.

  1. Le 19 janvier 2022, le PAD a formé un recours en annulation contre cette sentence finale, recours enregistré sous le numéro RG 22/01748.
  2. La cour est également saisie d’un recours en annulation contre un Addendum à la sentence finale et contre une sentence additionnelle qui ont été rendus le 15 avril 2022 par le même tribunal arbitral. Ce recours est enregistré sous le n° de RG 22/13862 et fait l’objet d’un arrêt séparé.
  3. La sentence finale, l’Addendum et la sentence additionnelle ont été rendus avant que la sentence arbitrale partielle du 10 novembre 2020 ne fasse l’objet d’une annulation par un arrêt du 10 janvier 2023 (RG n°20/18330).
  4. Un pourvoi ayant été formé contre cette décision, les deux recours ont fait l’objet d’un sursis à statuer dans l’attente de l’arrêt à intervenir de la Cour de cassation.
  5. Par arrêt du 19 juin 2024 (n° 23-10.972), la Cour de cassation a rejeté le pourvoi au motif que la cour d’appel avait à juste titre retenu l’irrégularité de la constitution du tribunal arbitral.
  6. À la suite de la décision de la Cour de cassation, l’instance a repris à l’égard des deux recours et l’affaire a été entendue le 4 novembre 2024.

II /PRETENTIONS DES PARTIES

  1. Dans ses dernières conclusions récapitulatives (n° 3) notifiées par voie électronique le 30 septembre 2024, le PAD demande à la cour, au visa des articles 1520, 2°, 3° et 5° du code de procédure civile, des articles 11, 13 et 14 du Règlement d'arbitrage de la CCI de 2017 et des recommandations de la CCI contenues dans la Note aux parties et aux Tribunaux Arbitraux sur la conduite de l'arbitrage applicable au 1er janvier 2019 de bien vouloir :

-           Déclarer le Port Autonome de Douala recevable et bien fondé en son recours en annulation ;

Y faisant droit,

  • Prononcer l’annulation de la sentence arbitrale finale du 9 novembre 2021 sur le premier moyen tiré de ce que le Tribunal Arbitral a été irrégulièrement constitué ;
  • Prononcer l’annulation de la sentence arbitrale finale du 9 novembre 2021 sur le deuxième moyen tiré de ce que le Tribunal Arbitral a statué sans se conformer à la mission qui lui avait été confiée ;
  • Prononcer l’annulation de la sentence arbitrale finale du 9 novembre 2021 sur le troisième moyen tiré de la violation de l’ordre public ;
  • En toutes hypothèses, annuler la sentence arbitrale finale du Tribunal Arbitral près la Cour Internationale d’Arbitrage de la Chambre de Commerce Internationale de Paris en date du 9 novembre 2021 et faire droit aux demandes du Port Autonome de Douala et débouter la Société Douala International Terminal de l’intégralité de ses demandes, fins, prétentions et conclusions ;
  • Condamner la Société Douala International Terminal à la somme de 200 000 euros au titre de l’article 700 du Code de Procédure Civile ;
  • Condamner la Société Douala Internationonal Terminal aux dépens dont distraction au profit de Maître ETEVENARD Avocat aux offres de droit.

2. Dans ses dernières conclusions notifiées par voie électronique le 19 juillet 2024, la société DIT, demande à la cour de bien vouloir :

  • Donner acte à la société Douala International Limited de son acquiescement au grief d’annulation invoqué par le Port Autonome de Douala, au soutien de sa demande d’annulation de la Sentence finale rendue le 9 novembre 2021 et de l’Addendum rendu le 25 avril 2022 (sic) par le Tribunal arbitral constitué dans l’affaire CCI n° 24211/DDA, fondé sur l’article 1520 2° du Code de procédure civile et tiré de l’irrégularité de la constitution du Tribunal arbitral, déjà retenu par la Cour de céans dans sa décision du 10 janvier 2023 (RG n° 20/18330), cet acquiescement ne valant ni acceptation ni acquiescement aux autres griefs et moyens invoqués par le PAD ;
  • En conséquence,
  • Dire sans objet les autres griefs soulevés par le PAD à l’appui de son recours en annulation dirigé contre la Sentence finale et l’Addendum ;
  • Annuler la sentence finale rendue le 9 novembre 2021 par le Tribunal arbitral constitué dans l’affaire CCI n° 24211/DDA sur le fondement de l’article 1520 2° du Code de procédure civile ;
  • Prononcer le dessaisissement de la Cour ;
  •  Juger que chacune des parties conservera la charge de ses frais irrépétibles et dépens.

3. La cour renvoie aux écritures susvisées pour le complet exposé des moyens des parties, conformément à l’article 455 du code de procédure civile.

III/ MOTIFS DE LA DECISION

  1. Sur l’acquiescement de la société DIT au grief d’annulation de la sentence tiré de la constitution irrégulière du tribunal arbitral
  2. Le PAD sollicite l’annulation de la sentence finale du 9 novembre 2021 sur le fondement de l’article 1520 du code de procédure civile et soutient que l’annulation de la sentence partielle pour constitution irrégulière du tribunal arbitral entraine obligatoirement l’annulation de la sentence arbitrale finale en date du 9 novembre 2021 rendue par le même tribunal irrégulièrement constitué, la constitution irrégulière du tribunal arbitral retenue par la cour d’appel de Paris et confirmée par la Cour de cassation affectant obligatoirement et impérativement la sentence arbitrale finale du même vice emportant l’annulation.
  3. La société DIT, en réponse, acquiesce audit grief tiré de l’irrégularité de la composition du tribunal arbitral, et partant à l’annulation de la sentence finale et de l’addendum pour ce seul motif, sans qu’il soit besoin de procéder à l’examen des autres griefs qui sont devenus sans objet et auxquels DIT précise ne pas acquiescer, les considérant irrecevables ou mal fondés. Elle demande qu’il lui en soit donné acte.

Sur ce : 

  1. Aux termes de l’article 408 du code de procédure civile, l’acquiescement à la demande emporte reconnaissance du bien-fondé des prétentions de l’adversaire et renonciation à l’action. Il n’est admis que pour les droits dont la partie a la libre disposition.
  2. En l’espèce, le litige porte sur un différend commercial international ne relevant pas d’une des matières énumérées par l’article 2060 du code civil pour lesquelles les parties n’ont pas la libre disposition de leurs droits.
  3. En acquiescant à la demande d’annulation fondée sur le grief tiré de l’irrégularité de la constitution du tribunal arbitral, indépendamment des autres griefs auxquels la DIT déclare ne pas acquiescer, la défenderesse au recours entend donner plein effet à la demande de la recourante, à savoir l’annulation de la sentence finale.
  4. L’acquiescement par la société DIT au grief fondé sur l’irrégularité de la composition du tribunal, vaut reconnaissance du bien-fondé de la prétention de la société PAD sur ce grief.
  5. Il y a lieu par conséquent de constater l’acquiescement et de prononcer l’annulation de la sentence finale, sans qu’il soit besoin de statuer sur les autres moyens.
  6. Sur les frais irrépétibles
  7. Le PAD soutient que la société DIT a fait preuve d’une attitude dilatoire qui a fait inutilement trainer la procédure en sollicitant un sursis à statuer et en formant un pourvoi en cassation qui a été rejeté, pour finalement acquiescer à l’annulation demandée, qui a néanmoins contraint le PAD à se défendre et à engager des frais irrépétibles importants.
  8. La société DIT soutient que l’équité justifie de laisser à chacune des parties la charge de ses frais, compte tenu de l’acquiescement et de l’absence de débat, l’annulation de la sentence étant acquise. Elle ajoute qu’en sollicitant le sursis à statuer, elle a évité des frais inutiles qui auraient été engagés en pure perte et qu’en tout état de cause, le PAD n’a fait que reprendre les moyens qu’il a soutenu dans la première demande en annulation.

Sur ce :

  1. L’acquiescement n’a pas pour effet de faire échapper la partie qui succombe au paiement des dépens et des frais irrépétibles que la cour estime équitable d’allouer à la partie qui obtient gain de cause.
  2. En l’espèce, l’acquiescement par DIT au grief tiré de l’irrégularité de la constitution du tribunal, quand bien même il emporte l’annulation de la sentence sans débat, a pour effet de faire droit à la demande formée par le PAD qui obtient gain de cause et justifie que la société DIT soit condamnée aux dépens ainsi qu’à payer une indemnité à PAD au titre de l’article 700 du code de procédure civile qu’il est équitable de fixer à la somme de 50.000 euros, compte tenu des éléments de la procédure.

 

IV/ DISPOSITIF

Par ces motifs, la cour

  1. Constate l’acquiescement de la société DIT au grief tiré de l’irrégularité du tribunal arbitral et à l’annulation de la sentence sur le fondement de ce grief, En conséquence,
  2. Annule la sentence arbitrale finale rendue le 9 novembre 2021 sous l’égide de la CCI (n° 24211/DDA/AZO),
  3. Dit n’y avoir lieu de statuer sur les autres griefs, devenus sans objet,
  4. Condamne la société DIT à payer à la société PAD la somme de 50.000 (cinquante mille) euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens.

LA GREFFIERE,

LE PRESIDENT,