CAMEROUN : Le Laboratoire d’Etudes et de Recherches en Droit des Affaires « LERDAF » lancé à l'Université de Yaoundé II


Par Roméo PIANGO


La décision n°2023/R000291/UYII/VREDPTIC/VRRCRME/SG/DAAC/DRD/SR du 25 avril 2023, portant création et désignation des responsables des laboratoires de recherches interdisciplinaires à l’université de Yaoundé II pour la période triennale 2023-2024-2025 a mis sur pied la création de vingt-sept (27) laboratoires de recherches interdisciplinaires (LRI) au sein de l’Université de Yaoundé II, parmi lesquels on a le Laboratoire d’Etudes et de Recherches en Droit des Affaires « LERDAF ». Le professeur KENMOGNE SIMO Alain, sous sa double casquette de directeur de ce laboratoire et de chef de département de droit des affaires et de l’entreprise de l’université de Yaoundé II a procédé ce 14 novembre à l’organisation d’une journée d’étude à l’occasion du lancement du LERDAF sous la thématique « les modes alternatifs de règlement des différends dans l’espace OHADA : entre africanisation et efficacité ». Quelle en a été l’issue ?

La journée du 14 novembre a effectivement marqué le lancement officiel du LERDEF au sein de l’université de Yaoundé II-Soa. Cet évènement a connu la participation d’un panel aussi varié que diversifié ayant eu pour noble mission d’entretenir cette foule immense d’invités de qualités, réunie pour l’occasion à l’amphi 250 de cette institution universitaire. Selon l’organigramme officiel, 09h devait marquer l’ouverture de cette session, et c’est finalement quelques minutes plus tard que monsieur le Doyen de la Faculté des Sciences Juridiques et Politiques le Pr. Alain ONDOUA prend la porale pour non seulement souhaiter la bienvenue aux différents invités, mais également pour fixer les jalons et démonter l’actualité de cette thématique ô combien importante tant pour la communauté scientifique que pour l’essor économique des Etats de l’OHADA.

 Quelque temps après, la parole est revenue au Pr. Alain KENMOGNE SIMO, chef de département de Droit des Affaires et de l’Entreprise et directeur de ce laboratoire pour le mot de présentation et l’allocution d’ouverture, suite à l’indisponibilité du Pr. MINKOA SHE, Recteur de l’Université de Yaoundé 2. La photo de famille marquait ainsi la fin de la cérémonie protocolaire et le début des travaux ; mais avant tout une table bien dressée qui comportait un petit déjeuné varié.

Africanisation des MARD dans l’espace OHADA

    La phase des travaux proprement dite était divisée en deux thématiques ayant connu la participation de neuf panélistes.

   -  La première thématique a portée sur « les : Défis et opportunités de l'africanisation des MARD dans l’espace OHADA », et c’est un panel constitué de cinq (5) imminents professeurs et docteurs aguerris dans la théorie et confirmés dans la pratique qui se sont lancés dans l’arène pour rendre cette thématique plus audible.

   Le Professeur TCHAKOUA Jean Marie (Professeur Titulaire, FSJP - Université de Yaoundé 2.) s’est brillamment illustré dans l’exercice par des « Propos introductifs sur les défis et opportunités de l’africanisation des MARD dans l’espace OHADA ». A-t-il martelé le fait que l’Afrique ne devrait plus rester en marge des MARD alors qu’elle, présente des atouts incontestables en la matière. Il a par exemple mis en exergue le fait que l’Afrique a une forte culture du compromis enfoui dans ses traditions les plus anciennes. Mais il a aussi évoqué les difficultés auxquelles l’Afrique fait face dans sa participation aux MARL. Pour énoncer cela, c’est via un tableau qu’il s’est le plus illustré en prenant en compte les statistiques des MARD au niveau du Centre international pour le règlement des différends relatifs aux investissements (CIRDI). Il s’est appuyé sur l’année 2020 en montrant que de ces statistiques, il en ressort trois enseignements :

  D’abord, il a pris en compte le critère de participation, et a constaté que l’Afrique est bien présente sur le terrain des MARD. Ainsi, 12% du contentieux au sein de cette institution sont dédiés aux Etats Africains, pour seulement 10% pour l’Europe occidentale. Etant donné que dans le système du CIRDI, les Etats sont plus défendeurs que demandeurs, cela signifie que les Etats Africains sont le plus souvent trainés devant ces centres.

  Ensuite, il a noté que l’Afrique subsaharienne fournit très peu d’arbitres et de conciliateurs. Ainsi, sur l’ensemble du personnel arbitre et conciliateur de cette institution, depuis sa création, elle n’a fourni que 02% d’arbitres et de conciliateurs, pendant que l’Europe en a fourni plus de 47%.

   Enfin, a-t-il martelé que l’Afrique fournit plus de contentieux alors que l’Europe occidentale fourni les arbitres. A titre d’exemple de l’année 1966 à 2020, la France à elle seule a fourni plus de 277 arbitres et médiateurs, le Royaume Uni en a fourni 206, la Suisse 144, l’Espagne 129 ; et si on veut revenir en Afrique, le premier en a fourni 03, le second 02 et il s’agit du Cameroun.

     A l’issue de l’illustration de ce tableau, il a essayé de faire un parallèle entre l’arbitrage CIRDI et celui de la Cour Commune de Justice et d'Arbitrage (CCJA). A-t-il rappelé que les deux systèmes n’ont pas le même Age car CIRDI c’est 1966 alors que CCJA c’est 1999. Mais il a au moins essayé de faire une comparaison ou tout au moins essayé d’éluder la part le fait que ce second système n’avait enregistré que 188 demandes d’arbitrages avec la plus importante en 2018 avec 24 demandes. Au regard de ces statistiques, il a relevé qu’il est urgent d’africaniser le MARD. C’est pourquoi sa question centrale était celle de savoir comment Africaniser ces MARD ?

    Pour apporter des éléments de réponse, il a proposé deux alternatives. D’abord, il faut renforcer la participation des acteurs Africains. Etant donné que ces acteurs peuvent être institutionnels ou personnes physiques. Relativement aux premiers, il faudrait une création exponentielle des institutions d’arbitrages, mais surtout, elles devraient également être sollicitées. Pour se faire, il faudrait qu’elles puissent délivrer une qualité de service. Pour qu’elles soient sollicitées, il faudrait que tous ceux qui tournent autour de l’arbitrage aient cela en vue, cas des fonctionnaires lors des grands contrats de l’Etat, les conseils des parties, les conseils des hommes d’affaires négociants de grands contrats qui devraient également penser à y introduire des clauses d’arbitrages ou de règlements qui orientent vers les MARD. Pour que les acteurs soient effectivement sollicités, si l’on compare à l’arbitrage su système international, ces arbitrages sont des concurrents réels du système d’arbitrage de la CCJA qui pousse les Etats lors des litiges à complètement ignorer ce second système au profit du premier. A l’époque, ce score médiocre du système de la CCJA pouvait s’expliquer par ses textes qui n’avait pas explicitement ouvert sa compétence au contentieux des investissements. Mais depuis la réforme de 2017, cela a été pris en compte et il invite ainsi les centres d’arbitrages Africains de se saisir de ces opportunités qui ne sont pas aussi que cela, car on n’a pas besoin d’un agrément pour ouvrir un centre d’arbitrage. Ici, il faut juste laisser parler la liberté d’entreprise. C’est possible de le faire, à condition d’avoir la volonté et être aussi sérieux car. Pour ce qui est des seconds, personnes physiques, on a les arbitres, les conciliateurs, les conseils des parties, l’environnement est peu reluisant.

   Après le renforcement de la participation des acteurs Africains, il a ensuite proposé la prise en compte du contexte africain dans la pratique des MARD. Il a préalablement voulu faire une précision que ce n’est aucunement sous le prétexte qu’on souhaite africaniser les MARD, qu’on doit apporter des dérogations aux standards internationaux qui ne seraient pas justifiés. Cela avait été fait dans le système d’arbitrage CCJA, mais a ainsi entrainé sa crise de crédibilité, à savoir l’idée de conférer aux arbitres l’immunité diplomatique, ensuite celle de faire cumuler par la CCJA des fonctions d’administration d’arbitrage et le contrôle de la légalité des sentences et de l’exéquatur. De l’avis des experts ce n’était pas une bonne chose car cela faisait crainte. On peut tenir compte du contexte africain pour la pratique de ces modes à titre d’exemple, on a la question de l’indépendance des arbitres et médiateurs. Cette question est difficilement irrésolvable en Afrique comme en Europe car les habitudes sont différentes. Aussi, on a la longueur de la phase de mise en place du tribunal arbitral due à la mauvaise foi et la réticence des parties ; Ce qui entraine la lourdeur de ces modes.

   A la suite de ces propos introductifs, et la synthèse effectuée par le directeur du LERDAF, c’est le Professeur BANAMBA Boniface (, Maître de Conférences, FSJP - Université de Yaoundé 2) qui a pris la parole pour nous entretenir sur « L’apport des modes non contentieux de règlement des différends dans l’espace OHADA ». Il a introduit ses propos en se posant la question de savoir si la CCJA elle-même va être indépendante, si elle ne va pas tout faire pour promouvoir mieux son système d’arbitrage et écarter les autres systèmes concurrents ? Ce qui le ramène à son thème sur les modes alternatifs non contentieux. Il a pris pour exemple l’affaire Bolloré contre le Port Autonome de Douala où il est arrivé qu’un arbitre manquait d’indépendance ce qui a obligé la cour d’appel de Paris d’enlever la sentence arbitrale qui accordait à Bolloré pratiquement 50 milliards de FCFA. En plus, l’arbitrage peut même poser un autre problème car les pays Africains sont condamnés à l’arbitrage et on se pose la question de savoir si l’arbitrage est véritablement indépendant ?

 Son idée consistait à choisir les modes alternatifs par rapport à la justice étatique, mais aujourd’hui, ne doit-on pas dire que mieux valait préférer les modes non contentieux au mode juridictionnel qu’est l’arbitrage ?

Dette et arbitrage

  Il a rappelé un certain nombre d’évidences. Que l’endettement soit tout à fait normal pour les Etats, car avec lui, on finance l’économie. Les emprunts ayant eu lieu dans les années 70 et 80 ont donné lieu à ce que l’on a qualifié de « crise de la dette souveraine de l’Etat », ayant débouché sur de nombreux procès. Procès devant la juridiction Etatique, procès en matière arbitrale et heureusement dans ce dernier cas, beaucoup de litiges se sont terminés par la négociation.

Il évoque le fait qu’il a eu à participer à de nombreuses négociations dans le club de paris, dans celui de Londres, et le succès dans la résolution des affaires lui a fait comprendre qu’il était nécessaire de privilégier la voie de la négociation tant avant le procès, pendant qu’après celui-ci au regard de la liberté conférée par ce mode non contentieux.

 Il a mis en exergue le choix que devrait opérer les acteurs de l’OHADA dans l’insertion de ce mécanisme dans les contrats. Toutefois, il a relevé que la difficulté qu’on observe est la non maitrise des acteurs africains de la rédaction des contrats ; ceci se matérialisant par le fait qu’on laisse l’entière liberté de rédaction des projets de contrats aux partenaires étrangers, choses qu’ils font avec plaisir tout en se privilégiant et insérant des clauses en leurs faveurs.

  En outre, au regard de l’importance de l’endettement pour le processus de développement des Etats, il a mis en exergue le fait qu’il peut se faire avec deux types de partenaires. D’abord ceux publics ou multilatéraux à savoir la Banque Mondiale, la Banque Africaine de Développement ; Puis les bilatéraux publics à l’instar des Etats à Etats qui ne vont généralement pas poser problèmes car vont parvenir à des ententes. On a également les bilatéraux privés, c’est un qui sont très dangereux à savoir les Banques privés ayant prêté à l’Etat. On a par exemple dans les années 1970 ou les pays membre de l’OHADA ont fait face aux difficultés de remboursements de la dette car ces états pour construire des routes hôpitaux, entreprises publiques avaient fait recours à ces institutions pour s’endetter. On a par exemple le cas de la SONARA qui s’est toujours endettées, ceci est dû à la mauvaise rédaction de son contrat initial, on a une usine ayant disparue du côté d’Edéa la CELLUCAM qui a créé un endettement pour lequel il faut répondre aujourd’hui. A côté des banques, les Etats ont également fait recours aux fonds d’investissements, on a par exemple le cas d’ENEO aujourd’hui.

  Il ajoute que ces endettements ont créés dans les années 1990 la « crise de la dette souveraine », ayant entrainé les « mécanismes de réajustements » car les Etats n’avaient plus de l’argent, ce qui atrophiait leur capacité de commercer à l’international. Dans les années 2000 cette crise de la dette souveraine a évoluée et encore aujourd’hui, elle est en train de se remettre en place. On a pour exemple la République Démocratique du Congo qui à un moment donné, la dette représentait plus de 120% du PIB, largement au-dessus des normes en matière de financement international qui est de 70% du PIB ; sa dette étant de 7.000 milliards de FCFA  pour une population de 03 millions d’habitants, ce qui cause un réel problème si on fait en terme de comparaison la dette du Cameroun qui est 11 à 12 milliards pour  une population d’environ 30 millions d’habitants donc la proportion pour le Congo est vraiment dangereuse. A Côté du congé, le Sénégal cause aussi des soucis avec un niveau d’endettement de 75%, ce qui a légèrement dépassé la ligne rouge en matière de seuil de financement international. Si l’on examine la majorité des Etats OHADA, l’on s’en rendra compte qu’à quelques exceptions près, ils ont les mêmes problèmes, qu’il faut donc s’atteler à résoudre avec les créanciers surtout privés.

Ainsi par rapport aux litiges liés au remboursement de la dette par les Etats, il a relevé qu’il y’a beaucoup d’inconvénients de confier leurs règlements aux juridictions Etatiques donc soit judiciaires, soit arbitrales. Il s’avère donc judicieux de régler ces litiges en faisant recours aux modes non contentieux de règlement des différends. Car, la dette souveraine qu’eurent ces Etats leur a conduit à ce mécanisme. Si on prend le cas du Cameroun, on a les créanciers privés qui avaient rachetés sa dette auprès des créanciers directs, devenant ainsi des créanciers indirects c’est ce que l’on qualifie de fonds vautours (il s’agit de véritables charognards qui vont racheter la dette d’un Etat à très bas prix et lorsque l’Etat refait sa trésorerie, il demande non seulement le vrai principal, pad celui du prix de rachat, mais aussi des intérêts). Beaucoup de locutions ont été utilisées pour le qualifier ; on aura par exemple des Sociétés requins, des fonds spéculatifs, des charognards, des prédateurs, des créanciers voyous. On a eu des cas dans lesquels le principal c’est 05 milliards alors que les intérêts montent à 20 milliards, ce qui a entrainé un procès devant les tribunaux de Londres et l’Etat du Cameroun avait été condamné ce qui a entrainé la saisie dans les comptes de la Société Nationale des Hydrocarbures (SNH) un montant de 25 milliards de FCFA. Si l’on prend le cas du Congo Brazza avec un fond vautour ou au départ, la dette était de 300 milliards, aujourd’hui c’est 01 million d’Euro soit approximativement 650 milliards de FCFA et tant que l’Etat du Congo n’a pas payé, les intérêts continuent à courir et quand on part devant les tribunaux, la condamnation ici va concerner son seulement le principal et les intérêts, et on aura un nouveau principal qui va également générer des intérêts ce qui pose un réel problème. Ce mode d’intervention des tribunaux étatiques est très dangereux et avait même prévu de saisir les comptes de l’ambassade de ce pays en France or ces comptes sont protégés par l’immunité. Toujours dans le cadre de cette affaire, on a saisi l’avion de l’ancien président qui a été vendu.  Si l’on va en RD Congo, il y’a également une affaire similaire dans laquelle pour une dette de 08 millions de Dollars, on s’est retrouvé avec des intérêts de plus de 100 millions de Dollars, et les intérêts continuent à courir tant que le Congo n’a pas payé. On a également un tel cas en Zambie qui a énormément défrayé la chronique du côté de Londres ou on avait des intérêts de 50 milliards pour un principal de 05 milliards. La difficulté ici est que les créanciers se précipitent à recourir devant les juridiction étatiques (arbitrales ou judicaires), qui vont non seulement consolider le principal et les intérêts, en rendant des sentences ou décisions qui vont donner des titres exécutoires avec de nouveaux montants, ce qui change complètement la donne dans les négociations. La position de ces juridictions étatiques est tout à fait justifiée puisque si l’Etat contracte avec un investisseur Etranger, il seront régis par des liens contractuels or c’est peu bénéfique pour les acteurs puisque dans le contrat si tu ne respectes pas tes obligations tu seras condamné et rien d’autre surtout si le créancier en face ne veut rien comprendre, il faudra payer largement plus, ce qui entrainera l’insécurité des biens de l’Etat à l’étranger ( à titre d’exemple, on s’en souvient de la saisine d’un Navire de l’armée de l’Argentine qui faisait un escale au Canada). Au-delà de cela, on a également les honoraires qui seront impressionnantes en moyenne 10%, accompagné du syndrome de l’homme blanc qui nous amène à toujours faire recours à des cabinets Européens pour d’importantes affaires alors qu’on aurait pu faire confiance à l’expertise nationale qui maitrise mieux les réalités du pays.

Au regard de toutes ces dérives, il propose d’aller vers les instances amiables ou non contentieuses qui présentent ainsi un certain nombre d’avantages si l’on s’en tient par exemple au cas du Cameroun. Ainsi, dans une certaine affaire, l’Etat du Cameroun devait payer plus de 270 milliards de FCFA de condamnation de principal et intérêts à certains fonds vautours ; mais les représentants dudit Etat leurs ont proposés des arrangements à l’amiable en faisant par exemple recours à des ONG qui ont eu à faire un peu de tapage médiatique afin d’amener ces derniers à emprunter le chemin proposer par les représentants de l’Etat. Après que l’acceptation ait été faite, la négociation s’est d’abord effectuée avec les créanciers directs, donc ceux du club de Londres, ce qui a entrainé un rachat en 2003 une dette à 14,5% du principal et ce rachat a donné lieu à un contrat entrainant ainsi la « remise de la dette » (partielle, totale ou conditionnelle : confère cas des C2D avec la France). A côté des remises de dettes, on a également des « Brady bonds » (un instrument émis par les pays émergents pour restructurer leur dette auprès des banques commerciales étrangères.). On a également la « dation en paiement » (remboursement d’une dette par des matières premières). On a aussi des « novations » (remplacement d’un contrat par un autre ce qui avantage le débiteur) en soulageant la trésorerie.

  Tous ceux-ci mettent en exergue les différents avantages que l’on a découvert dans les modes alternatifs non contentieux que sont la « négociation ». Ainsi, sa conclusion a toujours été et continue à être la suivante : on doit négocier avant la saisine des tribunaux, pendant leur saisine et même après la condamnation car on, arrive toujours à un résultat. L’Etat du Cameroun a plusieurs fois fait face à ces situations ; à titre d’exemple, il avait été condamné au paiement de 270 milliards aux fonds vautours, mais après un certain nombre de bruits, ils ont accepté de négocier et le Cameroun a racheté des intérêts qui étaient de 230 milliards pour un principal de 40 milliards. Pour la construction de l’aéroport de Yaoundé-Nsimalen, pour un principal de 08 milliards de FCFA, le Cameroun a été condamné de payer les intérêts de 72 milliards. Avec Sunset, le principal a été racheté ici à 23 milliards de FCFA par ce qu’il y’a eu des informations sur la situation du créancier et à combien elle avait acheté cette dette et son prix sur le marché secondaire international.

Arbitrage et PI

        La synthèse effectuée lors de la précédente intervention ayant toujours effectuée par le Directeur du dit laboratoire, la parole a ensuite été passée Docteur KANCHOP Thierry Noël (Chargé de Cours, FSJP- Université de Yaoundé 2), qui évoqué « Les MARD en propriété intellectuelle ». Ainsi, ce dernier après un bref rappel sur les notions théoriques du droit de la propriété intellectuelle, il est entré dans le vif du sujet en montrant que la particularité de cette matière c’est bien sûr la diversité la grande diversité des régimes applicables aux biens de la propriété intellectuelle en raison de la diversité des droits et biens intellectuels. La P. I. obéit à deux grandes divisions que sont la propriété littéraire et artistique (droits d’auteurs et droits voisins) et d’autre part la propriété industrielle (les créations industrielles et les signes distinctifs) il est donc difficile d’apporter une solution globale lorsqu’on est en face de la P. I. du coup lorsqu’on parle des MARD, il est donc difficile d’aborder la question sur un angle global. Du coup la question qu’il s’est posée est celle de savoir quels sont les critères qui permettent de savoir si un litige de P I peut être réglé par les MARL ? Il existe différents modes de règlements, mais il a délimité son regard autour de l’arbitrage et la médiation. En première partie il a parlé des critères inclusifs ou critères d’inclusion des critères d’inclusion des litiges de propriété intellectuelle dans le champ de l’arbitrage, et en deuxième partie des critères d’exclusion. Pour ce qui est des critères inclusifs, il a jeté un coup d’œil dans le droit de l’arbitrage OHADA, considéré comme le droit commun de l’arbitrage dans le droit des affaires dans notre espace, y compris l’accord de Bangui portant création et organisation du centre d’arbitra de de l’OAPI, il a ainsi pu dégager les critères généraux d’inclusion et ceux spécifiques au centre d’arbitrage. Dans les critères généraux, il a évoqué la question de la disponibilité du droit confer article 4 al. 2 de l’accord de Bangui soumet à l’arbitrage tout litige relatif à la P I à condition qu’il soit non seulement de nature contractuelle (contrats d’exploitations de la P I : contrats de cession des licences, de transfert de technologies, de nantissement ou apports en société, de franchise) car tout contrat relève de la disponibilité. Exception des contrats imposés (licences judiciaires et licences administratives ou licences involontaires) soit pour défaut d’exploitation, soit pour brevet de dépendance, soit pour situation d’urgence nationale. Ces litiges ne peuvent pas en principe être soumis à l’arbitrage et à la médiation au regard de la force de l’administration. Mais la question de rémunération pourra néanmoins être soumise à un défaut à une juridiction afin que celle-ci puisse en fixer le montant. L’autre cas c’est celui du litige de la relation du travail cas des créations intellectuelles salariées. Ici, il y’a un principe général de la prohibition des clauses compromissoires en matière de relation de travail en raison de la protection du droit des salariés. Ici c’est souvent la question de la rémunération personnelle qui cause souvent droit puisque la question de la titularité a déjà été réglé par le législateur OAPI. Dans ce genre de cas, il est dit que le salarié a droit à une rémunération exceptionnelle négociée d’accords parties donc ce pan du droit s’avère donc disponible. Un autre cas, on a les litiges de marques collectives ou marques de certification. En principe, la marque est un droit de propriété intellectuelle, mais lorsqu’elle est collective, elle devient en principe incessible, indisponible et donc ne pourrait pas être soumise aux MARD. Enfin, on a l’hypothèse du droit moral de l’auteur. Comme autres droits disponibles, on a noté les litiges relatifs à la réparation des droits de la propriété intellectuelle. On doit noter que les atteintes ne sont pas toujours du fait du cocontractant car ça pourra également être le fait d’un tiers (concurrence déloyale, contrefaçon) ceux-ci s’inscrivent dans la problématique générale de l’arbitrabilité des délits et des quasi délits. Désormais le principe est celui de la soumission des délits et quasi délits relatifs aux droits de la P I à l’arbitrage et à la médiation ; mais dans la pratique, il est vraiment difficile de voir que quelqu’un qui a porté atteinte à vos droits de la P I s’accorde avec vous par un compromis pour que la question soit soumise à un arbitre ou un médiateur.

A côté de ces critères généraux, il a ajouté les critères spécifiques liés au centre d’arbitrage ; cas par exemple du centre d’arbitrage et de médiation de l’OAPI dont ses critères se résument autour de la territorialité des litiges (domicile des parties, lieu de conclusion ou d’exécution, titre de P I délivré par l’OAPI). Sa première interrogation était la suivante est-ce que les litiges de la P I peuvent être soumis au règlement au règlement de la CCJA ? Il a répondu par l’affirmative car, les conditions de saisine du centre d’arbitrage de la CCJA ne sont pas exclusives, elles peuvent juste être concurrentes au précédent. Une seconde interrogation était celle de savoir si la CCJA pouvait être compétente pour connaitre le recours en annulation des sentences arbitrales rendues en matière de P I ? Pareille question s’est posée en matière d’assurance et la CCJA s’est déclarée incompétente pour connaitre du contrôle de la validité des sentences arbitrales rendu en matière d’assurance et donc, elle s’est déjà également déclarée incompétence pour une espèce concernant la propriété intellectuelle l’affaire OASIS télécom au Congo. L’article 36 règlement CCJA règle ce problème.

   En deuxième partie, il a évoqué les critères exclusifs et comme première articulation, il a parlé de l’exclusion du contentieux du l’acquisition ab initio du droit de P. I. Dans le contentieux de l’attribution. Il en a distingué deux autres à savoir d’une part celui de la validité et d’autre part celui de la titularité. Dans le premier élément, il a évoqué le l’hypothèse de nullité. Ainsi, il a rappelé comme solution que l’arbitre peut se prononcer sur ce point conformément à l’article 6 al. 2 du règlement de son centre d’arbitrage. Comme autre point il a évoqué le contentieux relatif à la déchéance ou à l’exclusion des droits ; ceux-ci ne peuvent pas être soumis à un arbitre ou un médiateur. Il a également ajouté des questions de l’opposition à l’enregistrement d’un droit, ici l’arbitre ou le médiateur ne peuvent pas être compétents car c’est la compétence spécifique du juge administratif.

    A côté des litiges liés à la validité, il a évoqué ceux liés à la titularité ((personnes réclamant la propriété ou la copropriété d’un droit intellectuel) dans la quasi-totalité des annexes de l’accord de Bangui,  les actions relatifs à la nullité, ainsi que tourtes contestations relatives à la propriété ou les titres de propriétés industriels sont portés devant les juridictions nationales compétentes ; le législateur OAPI laisse transparaitre l’idée que le contentieux de la titularité des droits ne peut pas être résolu par les MARD en raison de l’intervention de l’Etat dans la délivrance ou la reconnaissance de ces droits. A-t-il martelé  le fait que certains auteurs pensent le contraire car la demande d’un droit de propriété industriel s’analyse comme un acte unilatéral d’appropriation d’un bine sans maitre, la délivrance du titre à par une autorité administrative n’étant pas susceptible d’affecter la nature du droit de brevet qui est un droit de propriété sur un bien ( hypothèse d’une invention mise sur pied par plusieurs inventeurs) ici, le litige peut surgir à propos de la copropriété, sur la responsabilité d’un copropriétaire ; dans le cas de la propriété littéraire et artistique, si l’œuvre est le concours de plusieurs auteurs, il va falloir que la loir organise les relations entre auteurs à propos de l’œuvre qu’ils ont créés et c’est généralement à ce niveau que les litiges surviennent. Ces différends qui impliquent les intérêts privés sont susceptibles d’être portés devant l’arbitre ou le médiateur ; la question de la titularité du droit de P I n’est pas un problème d’ordre public et donc peut être réglée par voie de MARD.

 Enfin, comme dernier critère exclusif, il a évoqué l’exclusion des litiges relatifs à la répression des atteintes au droit de la propriété intellectuelle, cas de la contrefaçon est à la fois une action civile ou pénale. Les intérêts civils peuvent être portés devant un arbitre ou un médiateur, il est donc clair que seul un juge étatique peut prononcer des sanctions pénales en raison des diverses actions qui peuvent naitre des infractions comme celles liées à la contrefaçon à savoir la confiscation, etc.…).

      Puis c’était au tour Docteur MEMPHIL NDI Evelyne Patience (Chargée de Cours, IRIC – Université de Yaoundé 2) de nous entretenir sur « L’africanisation de l’arbitrage international dans la gestion du contentieux de l’Etat ». Après avoir défini l’arbitrage international, elle s’est intéressée au contentieux étant donné qu’elle parle du contentieux de l’Etat. Elle a défini le contentieux selon le Pr Gérard CORNU et a ainsi assimilé l’Etat à un sujet de droit et donc il y’aura exclusion des tribunaux étatiques afin de garantir l’impartialité du litige. Elle s’est s’intéresse également au contentieux de l’investissement qui implique l’Etat et les acteurs privés internationaux. Pour le contentieux de l’Etat, elle s’est préalablement intéressée à la prévention c’est-à-dire lorsqu’il faut formaliser le contrat, pendant que le litige nait et enfin pendant la période post contentieuse. De multiples difficultés ont été observées par elle au niveau de l’arbitrage de l’Etat du Cameroun à savoir son coût élevé des fonds liés à la gestion du contentieux de l’Etat liés à l’arbitrage, avec la moyenne des frais étant compté en milliards peu importe le contentieux car une fois que l’affaire est amenée devant le CCI ou le CIRDI ou les centres internationaux d’arbitrages, le coût de la procédure est extrêmement élevé dans les montant d’à partir de 50 milliards et les honoraires des avocats sont extrêmement chers et les frais d’arbitrages tournent autour de 200 millions de FCFA pour un arbitrage rapide et le cout des arbitres sont relatifs à leurs profils. Elle a identifié l’existence des arbitres qui coutent environ 02 millions la journée, et il y’a des dossiers qui durent plus d’un an ou deux ans voir 15 ans. Le problème lié à la préparation aux MARD au Cameroun est la rédaction du contrat et ceux qui ont sa charge soit sont de mauvaise foi, soit encore est incompétente. Dès l’instant de la période de pré négociation, le contentieux peut surgir si la ressource humaine n’est pas compétente ou si elle n’a pas pu déceler des failles.

  D’abord, elle évoque que pendant la rédaction du contentieux, la clause compromissoire, le choix de  la loi applicable (faire le choix de la loi que l’on maitrise), le choix du lieu d’arbitrage (choisir un lieu familier et avantageux en terme de proximité de droit), choix du mode de règlement (arbitrage ad hoc ou institutionnel l’insérer dans la clause compromissoire, mais au Cameroun on a la pathologie de la clause compromissoire, épuisement de toutes les voies de recours (négociation, conciliation) car l’arbitrage devient de plus en plus inefficace c’est un élément très efficace car permet d’empêcher d’aller en arbitrage et surtout de gagner en temps et permet également d’avoir une large manœuvre en permettant de faire des compensations.

Ensuite, à la naissance du contentieux ou pendant le contentieux, sur sa gestion, elle ressort une difficulté majeure qui est le mythe européen car dans des contentieux d’une certaine envergure, il est toujours fait recours aux arbitres européens et c’est quand c’est déjà trop tard ou très mauvais qu’on fait recours à la compétence nationale. De plus les arbitres désignés sont une bande de petits copains qui se connaissent depuis des années et cela pourrait causer des problèmes d’impartialité. Elle recommande d’éviter la réputation d’un arbitre car cela peut vicier la constitution du tribunal arbitrale en cas de conflit d’intérêt ou d’impartialité cela peut poser le problème de la récusation (faut faire un profilage des personnes qui vont vous représenter et préférer l’expertise, mais il y’a également le patriotisme qui est important). Donc, parler d’africanisation commence par les ressources humaines, il faut former les juristes et les mettre en contact des gros dossiers afin qu’ils puissent le moment venu défendre les intérêts de l’Etat (elle a donc appelé à la professionnalisation des laboratoires et du corps enseignant). Le dernier point sur lequel elle insiste est la gestion du décision making cross. Ici, elle a évoqué la hiérarchie de la décision (car ici, le niveau de décision est échelonné c’est le MINFI qui est au sommet car c’est lui qui signe la lettre de constitution ; puis on a le ministère de tutelle technique, ce dernier ne prenant la responsabilité d’une telle décision l’envoi au premier ministre, le premier ministère va l’envoyer à la présidence de la république ce qui veut dire que à chaque fois qu’on doit bouger d’un pas, il faut avoir l’accord du client et en l’espèce. S’il faut avoir l’accord du président de la république en pleine négociation dans un délai de deux mois, c’est quasiment mission impossible au regard de la brièveté du temps. Elle suggère que l’arbitre devra prendre ses responsabilités à chaque fois de l’évolution d’un dossier ; c’est pourquoi ce qu’il y’a à faire c’est que lorsqu’on veut l’accord du président, on fait une analyse globale du dossier et on fait ressortir ses forces et ses faiblesses on fait ressortir ses marges de négociation et on les assume : là c’est la position du conseil. Il prend ses responsabilités en essayant de les limiter en choisissant la meilleure alternative dans la négociation.

Enfin, lors de l’exécution de la sentence, elle relève également une possibilité de négocier. Elle relève que l’Etat s’appuie généralement sur le fait que les gens disent qu’il ne paye jamais ses dettes et il se bat pour rendre ses biens de plus en plus insaisissables car on sait bien qu’un bien commercial de l’Etat est insaisissable. C’est pourquoi il faut mettre ses avoirs sous protection diplomatique. Lorsqu’un créancier à un titre exécutoire, ne pouvant saisir les biens de l’Etat à l’étranger, ils vont donc revenir au Cameroun pour demander l’exequatur or c’est le juge du for qui délivre ce titre et lorsqu’il voit que ça ne va pas dans l’intérêt de l’Etat, il ne va pas le faire.

 Au final, elle s’interroge sur les MARD, en pensant que pour les Africains qui n’ont pas de structure ou des moyens et au regard de leurs mentalités s’agissant de l’exécution des sentences arbitrales, le MARD le plus efficace pour la résolution des différends ne serait-il pas la négociation pour se prévenir d’un contentieux arbitral qui pourra nous échapper ? Mieux se former et mieux encourager les contrats de partenariats ou nous avons encore la maitrise des enjeux et de la dimension humaine ?

   Docteur NDONGO DIMOUAMOUA Céline (Chargée de cours à l'Université de Douala, Arbitre sur la liste des arbitres du Centre de médiation et d'arbitrage du GICAM) a argumenté sur « La médiation en droit OHADA : défis et perspectives ». Ici, après avoir défini la médiation en droit, elle l’a qualifiée comme le Professeur Hugues KENFACK comme de ‘’parent pauvre de la justice contractuelle’’ et de plus, elle a catégorisé dans les modes amiables de règlement des litiges, en l’assimilant à une négociation c’est-à-dire une technique précise consistant à concilier les points de vue des parties.

  Elle a organisé son argumentaire sur trois grands axes à savoir les avantages, les défis et les perspectives de la médiation. Relativement aux avantages, elle a insisté sur le fait que ce mode prend en considération la volonté des parties, que celles-ci peuvent insérer la clause de négociation tant avant que pendant l’exécution du contrat, qu’il a le souci de confidentialité, est rapide et sa durée est limitée à au plus trois mois en fonction des parties. Pour ce qui est des défis, elle évoque la difficulté de mise en œuvre des clauses de négociation ou de leurs insertions dans les contrats. De plus, en ce qui concerne la médiation institutionnelle dans l’espace OHADA, elle met en exergue le nombre limité des médiateurs dans cet espace soit 10 au total, nombre extrêmement limité ; elle évoque également la faible visibilité des médiateurs, ainsi que l’absence des lois nationales sur l’homologation ou l’exéquatur des sentences issues de la médiation. Enfin, quant aux perspectives, elle exhorte les différents acteurs économiques à encourager les centres de médiation ; mieux encore, elle plaide pour une formation appropriée des médiateurs dans des centres sérieux et appropriés. En plus demande de mieux sensibiliser les milieux d’affaires et les opérateurs d’y recourir car il s’agit d’un mode consensuel ; enfin, elle plaide pour la mise en place des lieux d’échange et des fora ou peuvent se rencontrer des médiateurs. Pour conclure, elle met en exergue le fait que l’Acte Uniforme sur la Médiation est jeune, mais que si rien n’est fait, aucune évolution ne sera observée dans ce domaine.

Cette dernière intervention marquait ainsi la fin du premier thème, puis s’en est suivi une pause déjeunée et sans transition, la seconde thématique a été enchainée, portant sur « l’efficacité des MARD : une amélioration en matière de règlement dans l’espace OHADA ? ». Cette dernière a été attaquée par un praticien, le nommé Me FRUTON Xavier (Médiateur, Avocat au barreau de Nice), qui nous a entretenu sur le premier axe s’intitulant « L’apport de la médiation dans le règlement des différends : regard de droit comparé ». Ainsi, il a au préalable défini ce que l’on entend par médiation, par la suite, il l’a mise en exergue avec des notions voisines telles que la justice étatique, l’arbitrage et la conciliation (problématique de proposition impérative). C’est dans un tableau bien détaillé qu’il a matérialisé tous les éléments communs et distincts de ces modes en ressortant le particularisme de la médiation. Tout ceci s’est en comparaison du droit français de la médiation. En quelques mots, le particularisme de la médiation est que la décision n’est imposée par personne à la différence des autres modes, car ce sont les parties elles même qui seront à l’initiative de cette décision et de son exécution volontaire.       De manière plus claire, il a rappelé que le juge étatique rend une décision judiciaire à l’issue de laquelle on aura un gagnant et un perdant ; tandis que dans l’arbitrage, la décision qui en est issue est une sentence arbitrale ; pour ce qui est de la conciliation, on a la proposition du conciliateur qui est généralement impérative et donc s’impose aux parties et enfin pour ce qui est de la médiation, on aura une zone d’accord commun acceptable et le médiateur va rechercher l’IPBVM entendu comme (intérêts préoccupations, bonne foi, valeurs et motivations). Dans un autre tableau, il mettra en exergue les quatre finalités de la médiation : d’abord créative de liens nouveaux, ensuite rénovatrice ou ré activatrice des liens distendus, après curative à savoir aider les médiés à trouver leur solution au conflit, et enfin préventive à savoir éviter la survenance d’un conflit. Un tableau suivant a mis en exergue les trois grandes catégories de médiation à savoir celle conventionnelle (clause préalable/convention postérieure) ; puis la médiation institutionnelle (consumériste/administrativiste/constitutionnelle) et enfin juridictionnelle (judiciaire étatique/tribunal arbitral). En autre il s’est également attardé sur les attendus de la médiateur : indépendant ( obligation de révélation du lien de fraternité ou d’amitié) ; impartial ( incompatibilité : juge/arbitre/expert/avocat), multi-partial (entre dans le monde de l’autre); disponible ; compétent ( formé initial et continu, état d’être, outils/techniques) ; capable (plein exercice de ses droits civils) et enfin responsable du processus ( civil : déontologie et assurance, pénal : collusion/impartialité/confidentialité). Après toujours dans un tableau il a parlé des étapes de ce mode tant dans le passé à travers le pourquoi (besoins/intérêts) et le quoi (faits/ historialités/problèmes/préoccupations/valeurs/motivations), que dans le futur via le comment (recherche et création des solutions) et le comment faire (engagement réciproque).

        Le second axe de ce thème a été l’œuvre du Docteur ZOUATCHAM Hubert Patrice (Chargé de Cours, FSJP - Université de Yaoundé 2) portant sur « La coopération des juridictions nationales à l’efficacité des MARD : le rôle des juridictions étatiques ». En effet, il a mis en exergue le fait que malgré que les MARD ont été mis sur pied pour contourner ou se détourner des juridictions Etatiques, cela s’avère impossible puisque c’est l’Etat seul qui détient le pouvoir de l’exercice légal de la force ou de la contrainte car même si les arbitres médiateurs conciliateurs trouvent les meilleures solutions du monde, ils ne pourront pas contraindre les parties à s’exécuter ; seules les juridictions Etatiques ont ce pouvoir, c’est pourquoi au lieu de l’opposition, il a plutôt parlé de la collaboration. Ainsi, il a traité du problème de l’efficacité des MARD et le rôle des juridictions Etatiques.  Deux idées principales ont été entreprises. D’abord la matérialisation de la collaboration à l’efficacité des MARD et ensuite l’assistance des juges Etatiques pour l’exécution des accords issus de la médiation. Relativement à la première idée, il montre que cette coopération est matérialisée lorsqu’il y’a difficulté de constitution du tribunal arbitral. Ici, les parties ont l’obligation de faire recours au juge Etatique.  De plus, lorsque la compétence du tribunal arbitrale a été mise en œuvre, il revient au juge Etatique d’interpréter la clause arbitrale confer article 5 de l’AU sur la médiation. Par ailleurs, l’article 6 de l’AU sur l’arbitrage permet d’établir la compétence du juge Etatique malgré que les parties aient acceptées de faire recours aux MARD. Au moment de l’exécution des accords issus de la médiation, le J E saisi aura tendance dans une démarche d’exéquatur ou d’homologation d’estimer que celui-ci n’entre pas dans l’ordre public interne (le législateur ayant institué un limitant et un encadrant) ; toujours dans l’exécution, le J E peut repasser à un renforcement des limites du législateur liée à la volonté des parties. Quant au second axe qui porte sur l’amélioration du J E à l’efficacité des MARD, il a insisté sur le fait qu’il faut redéfinir les modalités de recours au J E à travers pour éviter que la partie dont la décision a été prononcée à son détriment puisse le saisir à tort et à travers et fragiliser ainsi les MARD ; mieux encore, en couplant la sentence ou l’accord à une décision exécutoire d’office. Cela permet que la personne qui a des velléités de saisir le juge soit d’abord contraint d’exécuter la sentence qui a été rendue, ensuite de saisir le juge ou alors de saisir le juge quand on justifie l’exécution de la décision ou en plus le J E annule ou sursoit à l’exécution de la sentence ou l’accord dans l’attente de la décision avenir en présentant les arguments pertinents. En outre, il évoque le fait que la possibilité est donnée aux parties de renoncer aux voies de recours à travers la saisine d’une J E comme le confirme bien certaines affaires de la CCJA. Il ajoute encore le fait qu’il faut augmenter les missions, voire le rôle du notaire dans les MARD pour éviter que le juge intervienne ou qu’il reformule voire retranche un litige pour lequel il n’a pas été saisi. A titre de propos conclusif, il pense que le législateur OHADA et le législateur national gagneraient à fédérer ces deux modes de justice afin qu’il n’existe non plus seulement une passerelle, mais également une collaboration de la part de leurs différents acteurs pour qu’à l’issue on soit en présence d’une seule justice beaucoup plus efficace.

       Monsieur WOUEMETAH Hervé, (Directeur du centre d’arbitrage FINANCIA) a développé sur « Le rôle des centres d’arbitrage à l’efficacité des MARD dans l’espace OHADA ». En effet, après une brève présentation, il a fait une rapide distinction entre les modes alternatifs (règlements juridictionnels :  MARC) et les modes amiables (règlements non juridictionnels ‘’ ou alternatifs à la justice : MARD) ; et a fait le rapprochement entre ces modes et les centres d’arbitrages, en définissant ces derniers comme des instances ou organismes d’arbitrage réglant des différends par des procédés juridictionnels ou amiables. Il a également défini l’efficacité comme le caractère de ce qui est efficace c’est-à-dire ce qui désigne l’effet qu’on en attend. Dans le domaine juridique, il appréhende l’efficacité comme un mode d’appréciation des conséquences des normes juridiques, leur adéquation aux finalités attendues, elles résident dans l’accomplissement d’une attente. Dans l’espace OHADA, depuis l’avènement de l’AUA on compte la présence de plusieurs centres d’arbitrage.

   Il s’est questionné sur l’efficacité des MARD, contribution des C A à la réalisation de leurs objectifs. Il a montré comment aujourd’hui plus qu’hier, les C A se sont donnés des mécanismes qui tendent à améliorer l’efficacité des MARD à l’instar des technologies de l’information et de la communication (TIC) avec pour conséquence majeure la dématérialisation des C A (cas des crises sanitaires de la Covid 19). Les grands centres d’arbitrages se sont améliorés en proposant des arbitrages en ligne. Dans l’espace OHADA, ce même problème s’est également posé avec acuité ce qui a posé le problème de l’impact des TIC dans l’efficacité des MARD. Comme éléments de réponse, il a proposé la nécessité de compléter les règlements d’arbitrages sur des questions comme la cybercriminalité, la signature électronique des documents. Ces éléments viendront à juste titre renforcer l’impact des centres d’arbitrages à l’efficacité des MARD. Sur un autre plan, le règlement d’arbitrage qui est le document de référence d’un centre, doit remplir l’exigence de clarté pour garantir l’efficacité des MARD. Ainsi, à la faveur de ce règlement, les parties s’imprègneront sur les différentes règles régissant le centre, informations capitales et décisives, puisqu’ils seront des critères de choix de désignation des centres d’arbitrages. Ces règlements garantissent aux parties des critères d’efficacités de la procédure. D’ailleurs, les C A offrent aux parties un éventail d’experts spécialisés qui servent comme arbitres ou comme médiateurs et dont l’expertise garantie une certaine efficacité de la procédure et a pour conséquence l’exécution spontané des sentences ou accords.

    Toutefois, il a néanmoins noté l’existence de subjectivité qui habite souvent chez certains arbitres issus des organismes d’arbitrages et qui les amèneraient à briser le pacte de la confiance et de la sincérité. Ces éléments peuvent contribuer à discréditer l’organisme d’arbitrage si les règles d’éthiques ou de moralité n’y sont pas érigées en principes fondamentaux par les arbitres. Toutefois, a-t-il déploré cette habitude fâcheuse qui continu à ternir l’image de certains centres d’arbitrages et pour cela que la plupart des C A de nos jours mettent un accent clé sur la moralité des arbitres, qui garantit les procédures crédibles, équitables et fiables.

   Il a ajouté que les C A sont aussi et surtout des vecteurs de sensibilisation, des canaux de vulgarisation des expériences liés à l’arbitrage et à la médiation, et même de formation. Cette dynamique de formation se justifie notamment quant au faible taux d’éducation juridique de certaines parties, qui ne maitrisent pas les fondamentaux de l’arbitrage et qui ont tendance à privilégier la voie judiciaire. Certains professionnels à l’instar de certains avocats, qui auraient pu orienter leurs clients vers les centres d’arbitrages ou de médiation vont préférer par méprise ou par ignorance des règles qui gouvernent l’arbitrage ou la médiation, saisir plus tôt les juridictions étatiques dans le cadre des contentieux qu’ils sont appelés à gérer indéfiniment. C’est fort de cela que la formation avec les webinaires ou encore des séminaires en présentiel a été érigée par certains centres d’arbitrages à l’instar du GICAM, le CIRAF.

    « La force exécutoire des décisions résultant des MARD : le cas spécifique des sentences arbitrales », est le dernier axe de cette rencontre et c’est le Docteur MOUAFFO TAMBO Blaise, (Chargé de cours, FSJP - Université de Yaoundé 2) qui a eu pour mission de l’expliciter.  Après un chaleureux remerciement à la modératrice, il a soulevé le problème de l’efficacité des sentences arbitrales, en montrant que l’efficacité des MARD se traduit par la mise en œuvre des décisions qui en résultent. En effet, selon lui, il ne suffit pas d’avoir une très bonne décision, encore faudrait qu’elle soit exécutée. Il a défini la sentence arbitrale comme la décision par laquelle les arbitres tranchent de manière définitive un litige à eux soumis que ce soit sur la contenance ou sur les moyens de la procédure. Il a rappelé que le rendu d’une sentence arbitrale peut donner naissance à deux hypothèses : dans la première, la partie condamnée pourra s’exécuter spontanément (c’est l’esprit même de l’arbitrage) ou alors il va falloir mettre en place des voies d’exécution forcées. Etant donné que la sentence arbitrale n’a pas de force exécutoire (phénomène vraiment déplorable). Cette sentence ne peut être exécutée sans faire recours à l’exéquatur, à moins qu’elle soit assortie d’une exécution provisoire. La partie n’ayant pas eu gain de cause peut user des voies de recours devant les juridictions étatiques.  Il existe un contentieux de l’exécution provisoire des sentences arbitrale et lorsqu’il est soulevé par une partie, c’est devant le juge étatique qu’elle doit s’adresser (l’inconvénient est qu’il y’aura perte de certains avantages liés à la justice privé à savoir son caractère confidentiel,). Dans le cas où la sentence arbitrale n’est pas assortie d’une exécution provisoire, elle est susceptible d’exécution forcée lorsqu’elle est revêtue d’exéquatur qui est un préalable à l’exécution forcée. Celle-ci est obtenue grâce à une action en exéquatur (vise à mettre à exécution la sentence arbitrale, à conférer force exécutoire. Confer article 25 AUA qui fixe le régime de l’action en exéquatur avec la compétence du juge national qui est très souvent le juge de référé « président TPI » et rend une décision appelée ordonnance sur requête. Les délais dont le juge dispose sont de 15 jours pour rendre sa décision ; si cela n’est pas fait dans ce délai, il est réputé avoir accepté l’exéquatur et donc la partie la plus diligente n’aura qu’à saisir le greffier en chef à l’effet d’apposer la forme exécutoire sur la minute de la sentence arbitrale et donc désormais, la sentence sera assortie de l’exéquatur. Les recours contre les refus de sentence arbitrales sont portés devant la CCJA qui peut annuler la décision du J E refusant l’exéquatur et tranche sur le fond du litige), qui s’oppose à une action en reconnaissance de sentence arbitrale ( ici, une partie qui ne réclame pas nécessairement l’exécution d’une sentence arbitrale, veut faire reconnaitre l’existence de celle-ci dans l’optique d’obtention de l’autorité de la chose jugée sur cette sentence et l’invoquer de façon incidente dans le cadre d’une autre procédure). S’il faut suivre la procédure pour obtenir l’exéquatur, faire face à son refus par le J E et finalement faire un ultime recours à la CCJA afin qu’elle nous l’accorde, il faut dire là qu’on s’éloigne un peu vers l’esprit des MARD.

   Le Règlement d’arbitrage CCJA prévoit également un régime de l’exéquatur, généralement lorsque c’est son centre qui a officié. La CCJA va statuer dans sa version judiciaire et au fond. On comprend bien que c’est la CCJA qui a le dernier mot dans le contentieux de l’exéquatur. Le problème causé ici est la concentration du contentieux par la CCJA.

      Au terme de l’épuisement de ces deux thèmes et huit axes, et après une intense session de questions et réponses, les propos conclusifs sont revenus à l’imminent Professeur Alex-François TJOUEN (Maître de Conférences Agrégé, Directeur du CEDIC, FSJP - Université de Yaoundé 2) qui s’est permis de relayer de long en large avec un langage aussi soutenu que comestible la synthèse de la rencontre tout en restant fidèle à l’argumentaire de chaque intervenant. Avant de remettre la parole au Directeur du laboratoire, il a suggéré une fréquence de l’organisation de telles rencontres. C’est un diner de séparation qui a clos la séance d’aujourd’hui et le rendez-vous a été donné à une date ultérieure.