OHADA : Un colloque international se tient à Yaoundé sur les 20 ans de la Cour Communautaire de Justice et d’Arbitrage

Un colloque organisé par la conférence des Barreaux de l’Espace OHADA et JUS AFRICA s’est tenu du 23 au 25 mars 2022 au Mont FEBE Hôtel Yaoundé – Cameroun sur le thème « Vingt ans de jurisprudence CCJA ».

La Cour Commune de Justice et d’Arbitrage de l’OHADA en abrégée CCJA créée en application du traité relatif à l’harmonisation du droit des affaires en Afrique, dit Traité OHADA, signé à Port Louis (Ile Maurice) le 17 octobre 1993, est effectivement entrée en fonction depuis le 4 avril 1997. Ce traité confère à la CCJA non seulement une compétence consultative, mais aussi le rôle de juridiction suprême pour le contentieux découlant de l’application du droit OHADA. Il faut cependant souligner que l’enthousiasme des milieux d’affaires reposait sur le fait que la CCJA était réputée à l’abri des pesanteurs de la justice étatique en raison de son caractère régional. C’est dans ce contexte favorable que la CCJA, mise sur pied en 1999 et composée de sept juges, a rendu ses six premiers arrêts le 11 octobre 2001.

 


Toutefois, à la suite de la réforme du Traité OHADA en 2008, le nombre des juges de la CCJA va passer de sept à neuf. Le Traité va laisser le soin au Conseil des ministres d’augmenter ledit nombre le cas échéant. En plus de cette option d’augmentation du nombre de juges, il y avait la volonté d’accroitre la rapidité du traitement des dossiers à la CCJA. Dès lors, l’on s’aventurait de dire que les fruits ont tenu la promesse des fleurs tant le nombre d’arrêts rendus par la CCJA est continuellement en croissance, hormis le ralentissement dû à la pandémie de la Covid 19. Cependant, peut-on pour autant dire que le bilan de la production jurisprudentielle de la CCJA en deux décennies est satisfaisant ?

 

QUEL BILAN POUR LA CCJA ?


La réponse à cette interrogation demande préalablement de relever les défis auxquels la CCJA a été opposée durant ses 20 premières années tant au regard des raisons ayant justifié la création de l’OHADA, que de la cohabitation de la CCJA avec des juridictions supérieures nationales. A noter que l’OHADA a été créée pour améliorer le climat des affaires en instaurant la sécurité juridique et processuelle. Par ailleurs, le droit OHADA n’étant qu’un droit d’exception, il était évident qu’une grande partie des affaires soumises à la CCJA soulèverait des questions de droit interne tranchées antérieurement par les Cours suprêmes nationales.


A l’analyse des décisions rendues par la CCJA, l’on s’aperçoit que les actes uniformes n’ont pas fait l’objet d’un traitement égalitaire, les justiciables l’ayant saisi majoritairement sur certaines matières plutôt que sur d’autres. Faut-il retenir que le message de la CCJA n’a pas été suffisamment clair au point de nécessiter la répétition et / ou la clarification de solutions précédemment adoptées ? Est-ce plutôt la diffusion lacunaire de la jurisprudence qui est à l’origine de cette situation ? Est-il possible de la justifier plutôt par la formation insuffisante des praticiens ou l’imprécision des textes ? Doit-on y voir la responsabilité des juridictions supérieures nationales ? Tant de questions qui se posent et qui amènent à étudier l’œuvre jurisprudentielle de la CCJA de manière globale, en lieu et place de l’analyse séparée de chaque texte adopté par le législateur OHADA.

 


En effet, partant du principe selon lequel les textes du droit OHADA concourent tous à la sécurité juridique et processuelle, il parait plus pertinent d’adopter une approche transversale pour analyser l’impact jurisprudentiel de la CCJA. Tel est le pari de la Conférence des Barreaux de l’Espace OHADA et de JUS AFRIC. Le droit prétorien de la CCJA étant étudié sous le prisme de la gouvernance d’entreprise, de la sécurité contractuelle, de la créance, des procédures inhérentes aux actes uniformes et du pourvoi devant la CCJA. Ce faisant, la pratique internationale de cette juridiction supranationale dans le cadre d’un colloque consacré à la réflexion sur « les vingt ans de jurisprudence de la CCJA » semble appeler la nécessité de dresser une sorte de bilan de ses activités depuis leur lancement.


Sur la base de ce qui précède, le colloque va se tenir sur deux principaux thèmes, répartis en plusieurs sous thèmes, tables rondes et ateliers.
Le premier thème intitulé la « sécurité juridique » s’articuler autour de plusieurs sous thèmes, notamment celui de la gouvernance d’entreprise et la sécurité contractuelle. Celui –ci abordera la question de la gouvernance d’entreprise qui au préalable, passe en revue les questions de les conflits entre actionnaires, la transparence des sociétés commerciales et la soumission des personnes publiques au droit OHADA. Par ailleurs, le second aspect de ce sous thème qui porte sur la sécurité contractuelle va s’appesantir sur les contrats structurels, les conventions sociétaires et les contrats ponctuels.

 

DEBATS DE FOND

Par ailleurs, le sous thème relatif à la créance, tablera sur la garantie de la créance, l’équilibre entre le créancier et le débiteur dans les conventions de sûretés, la détermination de la créance en péril et la protection de la créance dans les procédures collectives. Dans la même veine, la question de recouvrement de la créance n’est pas en reste. Elle va tourner autour du règlement forcé de la créance et les immunités d’exécution, du règlement de la créance par la réalisation des sûretés et le règlement de la créance par un tiers saisi. A la suite de cette table ronde, un atelier de discussion sur la jurisprudence CCJA et la réforme des actes uniformes est animé par un panel riche composé comme suite :


Modérateur : Me Siaka NIAMBA, Bâtonnier du Barreau du Burkina Faso
? Dr Gaston KENFACK DOUAJNI, Directeur de la Législation au ministère de la Justice, Cameroun, Président de l’Association pour la Promotion de l’Arbitrage en Afrique (APAA), Membre de la Cour Permanente d’Arbitrage de La Haye
? Pr Dorothé COSSI SOSSA, ancien Secrétaire permanent de l’OHADA
? Pr Mayatta NDIAYE MBAYE, Directeur général de l’ERSUMA
? Pr Paul-Gérard POUGOUE, Professeur émérite des universités
? Mme Evelyne HOHOUETO, Juge à la CCJA, ancienne présidente de la Commission Nationale OHADA du Togo
? Me Prosper AHOUNOU, Bâtonnier du Barreau du Bénin.


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S’agissant du thème 2 sur la « sécurité processuelle », il est axé sur des sous thèmes et tables rondes également. Le premier sous thème aborde les procédures consacrées par les actes uniformes. Il est orienté sur différentes tables rondes. Dans la première, la question des procédures judiciaires est portée sur l’exécution provisoire des décisions de justice, le règlement préventif et le redressement judiciaire. Dans une seconde étape, il est question d’aborder les modes alternatifs de règlement des différends, en présentant respectivement le règlement amiable des différends, l’égalité des parties dans la procédure d’arbitrage et le contrôle et l’exécution des sentences. Pour cela, un atelier discussion relatif à la jurisprudence CCJA et le développement des MARD est coordonné par :


Me Claude COELHO, Bâtonnier national de la République du Congo, modérateur
? M. Narcisse AKA, Secrétaire général de la CCJA
? Dr Sylvie BEBOHI, Avocate aux Barreaux du Cameroun et de Paris, associé HBE
? Me Joachim BILE-AKA, ancien Bâtonnier du Barreau de Côte d’Ivoire, membre de la Cour internationale d’arbitrage de la CCI
? M. Vieux EYIKE, Sous-directeur de la législation pénale au Ministère de la justice du Cameroun
? Me Mouhamed KEBE, Avocat aux Barreaux de Côte d’ivoire et du Sénégal, associé GENI & KEBE, membre de la Cour internationale d’arbitrage de la CCI
? Me Simon NDIAYE, Avocat au Barreau de Paris, associé HMN and partners.


Dans le second sous-thème intitulé le contentieux devant la CCJA, il s’articule sur le pourvoi en cassation devant la CCJA. Il consiste en la représentation des parties devant la CCJA, des moyens de cassation et le délai d’action. Au final, la dernière table ronde sur le droit interne devant la CCJA met un accent particulier sur la compétence de la CCJA quant au droit interne, la détermination de la juridiction compétente et l’application du droit interne par la CCJA.

ESSIANE MBENTI