UEMOA | CHANGES : Ce qui change dans la règlementation des changes depuis le 20 décembre 2024  


Par Dr ZOGO | 


Le nouveau Règlement N° 06/2024/CM/UEMOA relatif aux relations financières extérieures des Etats membres de L’Union économique et monétaire ouest africaine (UEMOA) abroge et remplace toutes dispositions antérieures traitant du même objet, notamment le Règlement n°09/2010/CM/UEMOA du 1er octobre 2010, relatif aux relations financières extérieures des Etats membres de l’Union Economique et Monétaire Ouest Africaine. Ce qui change dans les changes !

D'entrée de jeu, ce qui change sur la forme c’est déjà le nombre d’articles dans le règlement principal qui passe de 21 articles à 36 articles. Mais, ce qui importe par-dessus toute chose, c’est que cette réforme a été rendue inévitable après l’adoption de la dernière Loi (adoptée le 16 juin 2023) portant réglementation bancaire dans l’Union Monétaire Ouest Africaine. Pour preuve, les établissements pris en compte sont désormais les « établissements agréés ou établissements compris comme étant les banques, les établissements financiers de crédit, les établissements de paiement et les établissements de monnaie électronique tels que définis par la Loi portant réglementation bancaire dans l’Union Monétaire Ouest Africaine ».

La première précision qui est de principe se lit au détour de l’Article 3 nouveau qui consacre la liberté des mouvements de capitaux au sein de l'UEMOA. Il est indiqué que les mouvements de capitaux entre Etats membres de l’UEMOA sont libres et sans restriction aucune, sans préjudice des dispositions de la réglementation relative à la lutte contre le blanchiment de capitaux, le financement du terrorisme et de la prolifération des armes de destruction massive.

En matière de cession des devises, les délais de cession des revenus ou produits en devises encaissés à l’étranger ou versés par un non-résident qui étaient ancrés dans le règlement (entre 1 et 2 mois) sont désormais fixés, avec beaucoup de flexibilité, par d’autres dispositions en annexe.

LES INNOVATIONS SUR LES INVESTISSEMENTS ÉTRANGERS

En matière d’opérations d’investissement à l'étranger par les résidents, désormais, il est clairement dit que les prêts, cautions, garanties, acquisitions de créances sur un non-résident n’entrent pas dans les opérations effectuées par un résident dans un Etat autre qu'un Etat membre de l'UEMOA subordonnées à l'autorisation préalable du Ministre chargé des Finances. De plus, l'opération d’investissement à l’étranger visée ici doit être financée à hauteur de 75% au moins non plus d’un emprunt mais de manière plus large à « toute autre forme de mobilisation de ressources », à l'étranger.

De plus, « le réinvestissement à l’étranger du produit de la liquidation des investissements à l’étranger est soumis à l’autorisation préalable du Ministre chargé des Finances. Si le réinvestissement en dehors de l'UEMOA n'a pas fait l'objet d'une autorisation, le produit de la liquidation doit être intégralement rapatrié dans l’Union, par l'entremise d'un intermédiaire agréé, dans un délai fixé par la BCEAO », exige l’article 12 nouveau in fine.

Par ailleurs, les nouvelles dispositions des changes précisent le principe de l'autorisation préalable du Ministre chargé des Finances, après avis conforme de la BCEAO pour des prêts consentis par les intermédiaires agréés à des non-résidents (avec quelques exceptions comme le découvert au correspondant). Il en est autrement pour les opérations d’investissements directs étrangers ou de portefeuille dans un Etat membre de l'UEMOA et pour les emprunts contractés par un résident auprès d’un non-résident soumis au principe de liberté.

LES INNOVATIONS SUR LES INSTRUMENTS FINANCIERS DERIVES ET LES OPERATIONS SUR L’OR

L’Article 20 nouveau sur l’importation et l’exportation d’or en provenance et à destination de l'étranger prévoit désormais qu’elles soumises à l’autorisation préalable non seulement du Ministre chargé des Finances mais désormais de toute autre Autorité nationale compétente. Par ailleurs, les opérations d'exportation temporaire d'or, sous le régime de perfectionnement passif pour transformation, ouvraison, ou réparation ensuite pour réimportation, dont le poids et/ou la valeur excède un seuil fixé par la BCEAO, sont soumises à une procédure de domiciliation bien précise.

Si l’on peut d’emblée remarque que l’autorisation préalable de la BCEAO sur les appels publics à l’épargne a été reconduite, il ressort que le CREPMF a cédé la place à l’AMF-UMOA dans la nouvelle écriture. Une simple actualisation donc !

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En matière d’instruments dérivés de change, le nouvel article 18 admet désormais clairement qu’à côté des résidents, les intermédiaires agréés sont autorisés à effectuer avec les non-résidents des transactions sur instruments dérivés de change dans le cadre d’une opération de couverture de risque de change. Ils sont tenus d’assurer la couverture simultanée du risque de change sur les instruments dérivés négociés avec leur clientèle et effectuent sous leur responsabilité, les règlements requis au titre des transactions sur instruments dérivés de change, sur présentation de pièces justificatives dont la liste est précisée par la BCEAO. L’élargissement du trading sur les dérivés de change ne semble pas être étendu en matière de dérivés des commodités visiblement limités aux résidents et pas aux intermédiaires.

Enfin de compte, pour ce qui est de la responsabilité des intermédiaires agréés dans le cadre de leurs relations d’affaires, il ressort que, comme dans le Règlement de 2010, les intermédiaires agréés doivent veiller aux règles de change édictées. Cependant, pour coller aux évolutions du droit bancaire de la zone, la précision est apportée sur leur responsabilité du fait d’autrui notamment du fait des sous-délégataires, en matière de reprise de devises aux voyageurs étrangers ; du fait des personnes physiques ou morales ayant signé une convention avec ces intermédiaires agréés pour l’exécution, sous leur responsabilité, de transferts rapides de fonds ; du fait des établissements de monnaie électronique (EME) et les établissements de paiement (EP), notamment en matière de réception de fonds en provenance d'un Etat non membre de l'UMOA. Par ailleurs, le législateur précise que ces entités (EME et EP) ne sont pas habilitées à émettre des paiements sur l’étranger et donc doivent passer par des intermédiaires bancaires agréés…

LES INNOVATIONS POUR LES SGI DU MARCHE FINANCIER

Les SGI ou Société de Gestion et d'Intermédiation agréée conformément à la réglementation en vigueur sur le Marché Financier de l'UMOA avaient déjà été encadrée en 2010. Elles se conformaient notamment à l’instruction n°09/07/2011/RFE relative à la délivrance de l'autorisation de l'autorité en charge de la règlementation des relations financières extérieures des états membres de l'UEMOA, aux entités non-résidentes désireuses de faire APE dans l'UEMOA. La SGI déposait la demande d’autorisation auprès de la BCEAO et si accordée elle notifiait au CREPMF.

Le nouveau texte, en ses annexes, admet la possibilité pour les SGI de déroger à certaines conditions à l’autorisation préalable d’expédition des valeurs mobilières vers l’étranger. Une mesure questionnable quant on sait que les valeurs mobilières en UEMOA sont dématérialisées. Peut-être s’agit-il des valeurs mobilières étrangères pour les juridictions où celles-ci seraient encore physiques.

 

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Par ailleurs, la garde des valeurs mobilières par les SGI teneurs de comptes sont autorisés à mettre sous dossier étranger, les valeurs mobilières nationales ou étrangères appartenant à des non-résidents (sous certaines conditions). De plus, les titres étrangers détenus par une SGI dépositaire en UEMOA peuvent sans autorisation préalable être virées, sous dossier intérieur d'un résident, lorsqu'il est justifié à la SGI qui tient le dossier à débiter, que les valeurs faisant l'objet de l'opération ont été acquises par un résident, soit par dévolution héréditaire, soit par donation régulière, soit par achat sur le marché secondaire.

LES INNOVATIONS DANS LES SANCTIONS

Dans le nouveau règlement, les infractions commises par les intermédiaires agréés sont comme par le passé, soumises à la sanction simultanée de la BCEAO et de la Commission Bancaire. Mais, un domaine réservé est aménagé tant désormais, les intermédiaires agréés qui ont contrevenu aux prescriptions de la BCEAO (en matière de contrôle des créances et engagements des banques sur l’étranger et des limites des créances nettes en devises auprès de leurs correspondants bancaires installés hors de l'UEMOA, destinées à la couverture de leurs besoins courants en devises), sont sanctionnés (uniquement) par la BCEAO dans les conditions prévues en la matière par la loi portant réglementation bancaire, en vigueur dans chaque Etat membre de l’UMOA.