AFFACTURAGE/CAMEROUN: On peut désormais vendre ses créances aux banques

Lors de la session de mars 2014, le législateur camerounais a adopté et promulgué deux lois importantes  dans le secteur financier. Il s’agit de celle encadrant l’affacturage et celle portant dématérialisation des valeurs immobilières.

La loi n° 2014/006 du 23 avril 2014 régissant l’activité de l’affacturage au Cameroun  vient d’être promulguée le même jour  que celle n° 2014/007 du 23 avril 2014 fixant les modalités de dématérialisation des valeurs mobilières au Cameroun. Ces textes qui semblent aériens au grand public, sont pourtant d’une portée pratique indéniable. Prenons par exemple l’affacturage. L’article 2 de la loi susmentionnée le définit comme : «  une opération par laquelle, un adhérent (entreprise commerciale) transfère par une convention écrite, avec subrogation, ses créances au facteur (une banque) qui moyennant rémunération, lui règle par avance tout ou partie du montant des créances transférées, tout en supportant ou non, selon la convention des parties, les risques d’insolvabilité éventuels sur les créances cédées. »

Vendre ses créances
En fait, sous ce langage technique, il faut entendre simplement le fait que lorsqu’une entreprise a des clients qui lui doivent de l’argent ou des factures impayées, elle peut par un contrat écrit d’affacturage vendre à une banque ces dettes et factures que les clients lui doivent, afin que celle-ci les recouvre le moment venu. De fait, c’est l’entreprise qui cède ces créances qui est l’adhérent et la banque est le facteur.
Pour la sécurité de la banque, celle-ci peut garder un œil sur l’adhérent pour se retourner contre lui si jamais le client n’est pas solvable, on dit alors que l’affacturage est « avec recours ». La banque peut aussi tout prendre sur elle en termes d’insolvabilité du client débiteur.

Les conditions
La loi impose néanmoins que les dettes dues cédées soient au moins de 200 000 FCFA, qu’elles soient liquides (montant connu), exigibles (échéance atteinte). Il faut en outre enregistrer l’affacturage chez le greffier au Registre du Commerce et du Crédit mobilier.

Que gagnent les parties ?
Lorsqu’une entreprise décide de vendre les dettes et les factures impayées que ses clients lui doivent à une banque, elle gagne en sécurité et en rapidité, car la banque dispose de plus de moyens juridique et matériels pour le  recouvrement desdites créances. De son côté, la banque  touche des commissions soit au titre de cette prestation soit au titre des avances de trésorerie qu’elle peut avoir fait à l’adhérent sur la base de cet affacturage.

Contre les clients malhonnêtes
Si, d’aventure, les factures sont fausses, l’entreprise sera poursuivie pénalement. De même, la banque va prélever une retenue de garantie sur chaque facture pour prévenir le risque d’impayés.
Soulignons que si certaines banques, pratiquaient déjà l’affacturage, elles disposent de 2 ans, c’est-à-dire jusqu’en avril 2016 pour se conformer à la nouvelle loi.  Pour les aspirants, ils doivent demander un agrément au ministre des Finances qui doit lui-même prendre avis conforme de la Commission bancaire d’Afrique Centrale (Cobac).
Interdictions des valeurs mobilières en papier
Les valeurs mobilières, c’est-à-dire les actions (parts du capital social d’une entreprise qui donnent droit à des dividendes et au pouvoir de voter en assemblée) ou les obligations (dettes dues par l’entreprise) ne doivent plus être sous la forme physique. De fait, les valeurs mobilières doivent désormais être dématérialisées. L’article 1er de loi n° 2014/007 du 23 avril 2014 fixant les modalités de dématérialisation des valeurs mobilières au Cameroun explique « la dématérialisation d’une valeur mobilière est l’opération de substitution des certificats physiques des titres sous la forme électronique ».
Désormais, les actions vendues ou achetées vont circuler par des écritures comptables et des virements d’un compte des valeurs mobilières à un autre. Celles des personnes qui en ont encore sous la forme papier disposent de 4 ans pour les transformer.
Pour ce faire, les valeurs mobilières numérisées sont centralisées auprès du Dépositaire Central qui est aujourd’hui la Caisse Autonome d’Amortissement (CAA), autorité chargée de la dématérialisation des actions et des obligations.

LEXIQUE

Affacturage : Procédé de gestion commerciale et de mobilisation à fin de recouvrement des créances commerciales à court termes, dans lequel le “facteur” s’engage à régler à 100% à une date convenue les créances commerciales à court terme dont dispose un fournisseur nommé adhérent, se charge de l’encaissement des créances (qui lui sont normalement transférées par subrogation)et garantit sans recours la bonne fin du recouvrement, en assumant divers services non financiers (tenue des comptes clients de l’adhérent, études de marchés, renseignement, contentieux…)

Subrogation : Modalité conventionnelle ou légale du paiement , qui permet au tiers solvens d’exercer à son profit les droits du créancier payé par lui.

Solvens: Mot latin qui désigne aujourd’hui encore , la personne qui exécute l’obligation (spécialement celui qui verse une somme d’argent).

Willy  S. Zogo /Cette adresse e-mail est protégée contre les robots spammeurs. Vous devez activer le JavaScript pour la visualiser.

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